REDÉCOUVERTE DU TRÉSOR DE LA CATHÉDRALE DE CHARTRES DANS LA CHAPELLE SAINT-PIAT RÉNOVÉE
- Igor Robinet-Slansky
- 20 avr.
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 25 avr.

En franchissant le seuil de la cathédrale de Chartres, l’un des plus beaux joyaux de notre patrimoine religieux, on lève naturellement les yeux vers les flèches vertigineuses, vers les vitraux qui ont fait sa renommée, vers cette lumière suspendue entre ciel et pierre.
Du haut de ses 800 ans d’histoire, elle impressionne toujours. Elle a gardé de ses bases romanes la force et la puissance des volumes, et de son architecture gothique toute la verticalité et la finesse des grands monuments religieux des 12e et 13e siècles. Ses vitraux, dont le légendaire « bleu de Chartres », fascinent les visiteurs depuis des siècles. Mais un autre trésor, longtemps caché, vient tout juste de réapparaître au grand jour.
Car, si en 2025, la cathédrale de Chartres accueille de nombreux événements célébrant le millénaire de sa crypte (tous les détails sur le site de la cathédrale de Chartres), depuis septembre 2024, les visiteurs peuvent aussi redécouvrir le célèbre « trésor de la cathédrale », constitué à partir du 14e siècle et jusqu’à aujourd’hui.
Fermé au public depuis plus de vingt ans, ce trésor se compose d’un ensemble d’objets liturgiques, de reliquaires, d’éléments architecturaux ou encore d’œuvres d’art uniques, datant du Moyen-Âge au 21e siècle, et présenté dans la chapelle Saint-Piat tout juste rénovée – une chapelle dédiée au saint évangélisateur de la ville de Chartres dont la cathédrale conserve les reliques.
LA CHAPELLE SAINT-PIAT : UN ÉCRIN DE CHOIX POUR UN TRÉSOR INESTIMABLE
Accolée au chevet de la cathédrale, la chapelle Saint-Piat date du 14e siècle. Construite pour abriter les reliques du saint évangélisateur de Chartres, elle est à la fois sobre et lumineuse. Longtemps réservée au seul clergé, elle devient dans les années 1960 l’écrin du trésor de la cathédrale – jusqu’à sa fermeture en 2000 pour des raisons de conservation, dans l'attente de travaux de restauration qui débuteront en 2019 pour nous offrir, aujourd’hui, un écrin unique pour une collection d’œuvres et objets exceptionnels.
Aujourd’hui, la voilà métamorphosée. Après un vaste chantier conduit par la DRAC Centre-Val de Loire, les visiteurs peuvent à nouveau y pénétrer et découvrir un parcours muséographique repensé sur deux niveaux par la Drac Centre - Val de Loire, le rectorat de la Cathédrale et le Centre des monuments nationaux, en charge des visites. Il dévoile près de 150 œuvres, fruits d’un héritage tumultueux : constitué dès le Moyen Âge, largement dispersé à la Révolution, le trésor a été recomposé au fil des siècles.
La salle capitulaire, au rez-de-chaussée, accueille désormais le lapidaire, avec des sculptures monumentales et des décors peints, notamment des reliefs du jubé du 13e siècle, un tympan peint relatant l’histoire de l’Église, et des éléments précieux du Portail royal : édifié sur la façade Ouest, entre les deux tours, vers 1145-1150, ce portail réchappera de l’incendie de 1194 ; on peut en admirer les superbes statues colonnes représentant des figures de l’Ancien Testament.
À l’étage -par où la visite débute -, la chapelle haute expose les pièces les plus précieuses, anciennes et modernes : orfèvrerie, calices et ciboires, navettes à encens, reliquaires (pour beaucoup profanés à la Révolution), crosses, retables, tabernacles, parures, ex-voto, armures, sculptures… dans une mise en scène discrète et élégante.
Parmi les objets rares et marquants : une navette à encens en argent et nautile offerte en 1540 par Miles d’Illiers, qui prend la forme d’une nef surmontée d’un dragon crachant du feu – un pur chef-d’œuvre Renaissance.
On peut aussi admirer le magnifique tabernacle dit de Saint-Aignan, orné d’émaux champlevés, qui trône au centre de la chapelle, tel un joyau revenu de loin – il n’existe qu’un autre exemplaire similaire, aujourd’hui au Metropolitan Museum de New York.
On croise également une Vierge à l’Enfant en bois du XVIIe siècle, fidèle copie de la statue romane autrefois vénérée dans la crypte, des ornements liturgiques richement brodés, ou encore deux armures d’enfants royaux offertes en ex-voto, et de rares ceintures de perles de coquillages (wampums), cadeaux diplomatiques des Hurons et des Abénaquis à la Vierge de Chartres, témoignages inattendus des liens entre les missions françaises du XVIIe siècle et les peuples autochtones d’Amérique du Nord.
L’OMBRE DE LA SAINTE CHEMISE OU SANCTA CAMISIA AU CŒUR DU TRÉSOR DE LA CATHÉDRALE DE CHARTRES
Grande absente de la chapelle Saint-Piat, mais trésor du trésor de la cathédrale de Chartres : la Sancta Camisia, autrement connue comme le Voile de la Vierge. Conservé à Chartres depuis que le roi Charles le Chauve, petit-fils de Charlemagne, en a fait don à la cathédrale en 876, il a très vite été l’objet central de nombreux pèlerinages chartrains au fil des siècles. Offert par l’empereur d’Orient à Charlemagne, alors empereur d’Occident, ce voile sacré, qu’on appelle aussi « sainte chemise » serait celui que Marie aurait portée lors de l’Annonciation (épisode biblique où la Sainte Vierge apprend par l’ange Gabriel sa maternité divine).
Conservée dans la Sainte-Châsse depuis le 10e siècle, dans une chapelle dédiée, cette relique exceptionnelle a permis d’enrichir le trésor de la cathédrale en attirant des dons et diverses offrandes (parures, objets...). La chemise est d’ailleurs devenue l’emblème du chapitre de la cathédrale.
LE TRÉSOR DE LA CATHÉDRALE DE CHARTRES : UNE INVITATION AU SACRÉ ET AU SENSIBLE
La restauration de la chapelle Saint-Piat est bien plus qu’une simple remise en valeur. Elle redonne à voir un pan oublié du patrimoine chartrain, entre dévotion populaire et raffinement artistique. Le dialogue entre l’ancien et le contemporain – les sculptures gothiques côtoyant les vitraux abstraits de Bang Hai Ja – crée un parcours sensible et spirituel, ouvert à tous les regards, qu’ils soient croyants, curieux ou simplement émerveillés.
Redécouvrir le trésor de la cathédrale de Chartres, c’est ainsi plonger dans l’histoire d’un lieu, mais aussi dans les multiples gestes d’hommage, de foi ou d’art qui l’ont traversé au fil des siècles. Un trésor vivant, à l’image de la cathédrale elle-même.
INFORMATIONS PRATIQUES
Quoi ? Le Trésor de la Cathédrale de Chartres
Où ? Cathédrale de Chartres, Cloître Notre-Dame, 28000 Chartres
Accès en voiture (1h du Mans ou de Paris)
Accès en train : de 50 min à 1h15 en TER depuis Paris Montparnasse puis 10 minutes à pied de la gare de Chartres.
Quand ? Du 2 mai au 4 septembre : de 10h à 12h45 et de 14h à 18h.
Du 5 septembre au 30 avril : de 10h à 12h45 et de 14h à 17h.
Fermé les dimanches matin, les 1ers janvier, 1er mai et 25 décembre.
Combien ? Tarif individuel : 6€
Tarif groupe : 5€
Plus d’informations sur le site de la cathédrale de Chartres et billetterie en ligne sur le site du Centre des monuments nationaux.
SOURCES
Visite du trésor de la cathédrale de Chartres
Dossier de Presse
https://www.cathedrale-chartres.org/cathedrale/monument/le-tresor/
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