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JOURNÉE INTERNATIONALE DES DROITS DES FEMMES: LE DISCOURS DE SIMONE VEIL (LOI IVG) S’EXPOSE À L’HÔTEL DES ARCHIVES

 


En cette Journée Internationale des Droits des Femmes, et alors que le lundi 4 mars 2024 est entré dans l’Histoire comme le jour d’inscription dans la Constitution française de la «liberté garantie» pour les femmes d’accéder à l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse), les Archives nationales inaugurent le deuxième volet de leur cycle «Les Remarquables», en présentant le manuscrit du célèbre discours de Simone Veil prononcé devant l’Assemblée nationale le 26 novembre 1974.


Avec ‘Les Remarquables’, les Archives nationales, situées dans le magnifique Hôtel de Soubise au cœur du quartier du Marais à Paris, mettent en lumière chaque semestre un document emblématique de l’Histoire de France à l’occasion d’une exposition au format très recentré.



Après le rouleau d’interrogatoire du procès des Templiers de 1307, et dans un tout autre genre, c’est le manuscrit original et la version dactylographiée du discours de Simone Veil prononcée en 1974 pour défendre le projet de loi de légalisation de l’avortement, qui sont exposés au public.



Si la loi portée par Simone Veil, alors ministre de la Santé du président de la République Valéry Giscard d’Estaing, est finalement adoptée le 17 janvier 1975, la route vers la dépénalisation de l’avortement en France fût longue et jonchée d’obstacles.


En effet, après la légalisation de la contraception en 1967 (en réalité appliquée en 1972 seulement), les engagements et combats pour les droits des femmes, et en particulier celui à disposer librement de leur corps, se focalisent sur la dépénalisation de l’IVG. Car malgré son interdiction, l’avortement est bel et bien une réalité en cette fin des années 1960. Réalisées dans des conditions sanitaires dangereuses pour les femmes, ces opérations clandestines, estimées en 1962 entre 800 000 et un million, conduisent bien souvent à de graves complications, voire même à la mort des femmes concernées -plusieurs centaines de décès annuels.

 

Face à cette réalité, les voix s’élèvent en faveur de la dépénalisation de l’IVG, mais également pour permettre sa pratique sous contrôle médical. Le 5 avril 1971, le Manifeste des 343, paru dans le Nouvel Observateur, présente la signature de 343 femmes françaises attestant publiquement d’avoir eu recours à l’avortement. Parmi celles qui clament ‘Je me suis fait avorter’, on trouve des personnalités publiques comme Catherine Deneuve, Simone de Beauvoir, Marguerite Duras ou encore l’avocate Gisèle Halimi.



Cette dernière va d’ailleurs devenir l’une des figures emblématiques de ce combat. En octobre et novembre 1972, à Bobigny, en banlieue parisienne, elle va en effet prendre en charge la défense d’une jeune femme, Marie-Claire Chevalier, qui, violée à l’âge de 16 ans, risque d’être condamnée pour pratique illégale de l’avortement, selon la loi de 1920 interdisant l’IVG et la «propagande anticonceptuelle». Sa mère et trois autres femmes sont également jugées pour complicité. Après un procès retentissant, Marie-Claire Chevalier est acquittée le 11 octobre 1972, suivie, le 8 novembre, par deux des autres prévenues. Ce verdict fera jurisprudence, et à partir de cette date, les condamnations pour avortement vont fortement diminuer.

 

Car à la suite de ce procès, la lutte pour le droit à l’IVG se durcit et devient politique. Le 3 février 1973, le Manifeste des 331, paru également dans Le Nouvel Observateur, présente les signatures de 331 médecins affirmant avoir pratiqué des avortements.



Le processus de dépénalisation est en marche. Nous sommes alors sous la présidence de Georges Pompidou (1969-1974), et les ministres de la Justice successifs, René Pleven d’abord (22 juin 1969-15 mars 1973) puis Jean Taittinger (5 avril 1973-27 mai 1974), demandent au Parquet de ne plus poursuivre les femmes ayant recours à l’avortement.

 

Un premier projet de loi de dépénalisation sera ainsi déposé, avant d’être repris dans le programme du candidat à la présidentielle Valéry Giscard d’Estaing en 1974. Cependant, une fois élu, face au refus -pour raison d’éthique personnelle- de son ministre de la Justice, Jean Lecanuet, le nouveau président de la République va faire appel à sa ministre de la Santé, la désormais célèbre Simone Veil, pour porter cette loi controversée. Le 26 novembre, à l’Assemblée nationale, dans un discours poignant et historique devant des députés majoritairement masculins et, pour une bonne partie, hostiles, elle présente son projet de loi de dépénalisation de l’avortement.

(Rendez-vous ici, sur le site de l’Assemblée nationale, pour retrouver l’intégralité de ce discours)

 


Après de nombreux débats animés et parfois violents, le 29 novembre 1974 à 3h40 du matin, la loi est finalement adoptée par 284 voix contre 189 -majoritairement de Gauche et du Centre. Le Sénat votera ‘pour’ à 185 voix contre 88, et le texte final est définitivement validé à l’Assemblée le 20 décembre 1974 par 277 voix contre 192. La loi dépénalisant le recours à l’interruption volontaire de grossesse est promulguée le 17 janvier 1975, une date historique.

 

Simone Veil entre alors elle-aussi immédiatement dans l’Histoire. Née le 13 juillet 1927 à Nice, déportée à 16 ans avec sa famille au camp d’Auschwitz, d’où elle ressort vivante avec ses sœurs, mais sans ses parents ni son frère, Simone Jacob épouse Antoine Veil en 1946 avant de devenir haut fonctionnaire dans la magistrature. Nommée ministre de la Santé par Valéry Giscard d’Estaing en 1974, elle se voit confier la lourde mission de porter le projet de loi de dépénalisation de l’IVG, une loi finalement promulguée en 1975. Présidente du Parlement Européen entre 1979 et 1982, de nouveau ministre des Affaires sociales de la Santé et de la Ville du gouvernement d’Édouard Balladur entre 1993 et 1995, sous la présidence de François Mitterrand, elle sera membre du Conseil constitutionnel de 1998 à 2007, avant d’être élue à l’Académie française le 20 novembre 2008. Simone Veil disparaît le 30 juin 2017. À la demande du président Emmanuel Macron, elle entre au Panthéon le 1er juillet 2018 où elle repose désormais avec son mari dans la célèbre crypte, aux côtés des Grandes et des Grands qui ont marqué l’Histoire de France.



INFORMATIONS PRATIQUES

 

  • L’Hôtel des Archives est en accès libre et gratuit.

  • Toutes les informations concernant le cycle Les Remarquables, ainsi que les horaires d’ouverture de l’exposition et de l’hôtel de Soubise, sont disponibles sur le site des Archives nationales  

Retrouver également l’histoire et ma visite de l’hôtel de Soubise dans l’article et le podcast sur ce site.

 

SOURCES


 

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