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LE PETIT APPARTEMENT DU ROI À VERSAILLES

Dernière mise à jour : 10 mai 2023


Suivez-moi à la découverte du Petit Appartement du Roi au château de Versailles. Des pièces ouvertes uniquement à la visite guidée et qui permettent de mieux découvrir l’intimité des rois de France, au cœur des pièces privées où ils pouvaient se retrouver avec leurs proches.



Vous connaissez bien sûr le Château de Versailles. Ses appartements royaux, sa Galerie des Glaces, son parc et ses jardins, ou encore le domaine de Trianon et l’insolite Hameau de la Reine. Mais saviez-vous qu’il existait en réalité deux Versailles ?

En effet, si l’on a en tête le Versailles grandiose voulu par le Roi Soleil lui-même, il existe aussi un Versailles caché, en arrière-plan des pièces et des salons officiels.


Dans le Versailles officiel, constitué des appartements dits d’apparat, le Roi et la famille royale vivent en public. Ils doivent se montrer et faire rayonner leur pouvoir royal devant la cour et les visiteurs. Ils se lèvent, mangent, parades et reçoivent en public. Leur agenda, leurs occupations comme leur conduite suivent les règles de l’étiquette (cet ensemble de règle qui codifient la vie de cour), et sont connus et visibles de toutes et tous. Chacun.e doit ainsi pouvoir savoir à toute heure ce que fait le souverain.


Dans le Versailles intime, en revanche, qui se situe dans le château à l’arrière des appartements d’apparat, mais aussi au Grand et au Petit Trianon, ou encore au Hameau de Marie-Antoinette, les souverains peuvent s’éloigner des contraintes de la vie de cour pour se retrouver avec leurs proches ou vaquer à des occupations plus personnelles. Ces lieux cachés réservés à l’intimité des rois et reines, ce sont les Appartements Intérieurs ou Petits Appartements.


C’est aujourd’hui dans l’appartement intérieur du Roi que je vous invite. Cette visite ne se fait qu’avec un guide et elle n’est ouverte que sur réservation sur le site du Château de Versailles. J’espère que je réussirai à vous communiquer le plaisir que j’ai eu à parcourir ces pièces peu connues du grand public et pourtant riches d’Histoire et d’histoires.


Après un point historique sur la création et l’évolution de cet appartement privé du roi, je vous proposerai de partager la visite que j’en ai faite il y a quelques semaines.


Histoire de l’Appartement Intérieur du Roi


La configuration du petit appartement du roi que nous pouvons visiter aujourd’hui est celle laissée par le dernier roi à l’avoir occupé -et le dernier roi de France de l’Ancien Régime : Louis XVI (règne: 1774-1793). Cependant, l’essentiel de l’aménagement reprend les décors et l’aménagement de Louis XV (règne : 1715-1774), premier roi à avoir transformé et conçu ces espaces comme de véritables lieux de vie intime, où il pouvait s’isoler, dormir, travailler, dîner, recevoir ses proches et vivre en famille loin des regards publics.

Car ce n’était pas la volonté première de Louis XIV (règne: 1643-1715) lorsqu’il crée ces appartements intérieurs. Dès 1661, lorsque le Roi Soleil envisage des travaux à Versailles, qui n’est encore que l’ancien relais de chasse de son père Louis XIII, il réfléchit aussi à exposer ses collections d’œuvres d’art et de bijoux dans ce château qu’il ambitionne d’agrandir. C’est chose faite en 1682, année durant laquelle le Roi s’installe définitivement avec sa cour à Versailles. Dans les appartements intérieurs qu’il a fait construire en retrait de ses appartements officiels, Louis XIV va exposer ses plus beaux tableaux, ses bijoux les plus précieux et ses livres les plus rares, mais aussi une collection de médailles retraçant l’histoire de France et des objets que les ambassadeurs étrangers lui ont offert. Sous le règne du Roi Soleil, seuls sa famille et quelques privilégiés, amateurs d’art comme lui, sont invités à visiter ces espaces d’exposition privés.


Après la mort de Louis XIV le 5 septembre 1715, c’est son arrière-petit-fils Louis XV qui lui succède à l’âge de 5 ans. Après sa majorité et quelques années de règne, le jeune roi, moins adepte des contraintes de l’étiquette qui imposent au Roi une vie publique de tous les instants, va chercher à se créer des espaces privés pour s’évader des lieux de représentations.


Point Anecdote ! Saviez-vous que tout le monde pouvait accéder au roi, sous certaines conditions?

A Versailles, pour le roi, il y a peu de différence entre la vie publique et la vie privée à la cour.

Par tradition, et contrairement aux autres cours européennes, la monarchie française se doit d’être accessible à ses sujets. Tout le monde peut voir et rencontrer le roi qui appartient à tous. En se montrant, le roi renforce son pouvoir et son influence sur son peuple ; et en ouvrant sa demeure, il exprime et impose sa gloire et sa splendeur.

Ainsi, à Versailles, sous l’Ancien Régime, à part la Chapelle Royale et certaines parties des appartements privés du roi et de la famille royale, le château comme les jardins sont accessibles à tous les sujets et à toutes les nationalités. Entre 3 000 et 10 000 personnes passent à Versailles chaque jour. On peut ainsi y croiser les courtisans, bien sûr, mais aussi des gens du peuple et des visiteurs étrangers. Sachez que quand le roi est présent, il est plus compliqué d’accéder à l’ensemble du château, mais que les espaces publiques et de représentation du pouvoir comme la Galerie des Glaces et le Grand Appartement du roi sont ouverts.

Cependant, même si chaque sujet a le droit de venir à la rencontre du roi pour présenter un problème ou faire une demande, la visite n’est possible que sous certaines conditions.

  • Tout d’abord, l’accès est interdit aux prostituées, aux moines mendiants et aux personnes ayant récemment contracté la petite vérole.

  • Ensuite, il faut être présentable et habillé correctement. Il faut obligatoirement porter un chapeau et une épée (on peut en louer à l’entrée du château). Si vous voulez avoir une chance d’être accueilli dans des pièces moins fréquentées, ou si vous souhaitez par exemple assister au dîner du roi (c’est-à-dire notre déjeuner actuel), il faut vous faire remarquer en portant un habit soigné ou coloré qui vous distinguera du reste des visiteurs et qui vous ouvrira plus de portes.

  • Pour accéder à plus de lieux intimes et être traité en visiteur privilégié, c’est possible. Il faut être aristocrate ou d’un rang social élevé ; ou alors connaître quelqu’un qui vit ou travaille au château (garde, valet, courtisan…). Plus votre connaissance est influente, plus vous pourrez avoir accès à telle ou telle partie du palais.

Concernant les jardins, il faut savoir que depuis Catherine de Médicis (1519-1589) au 16ème siècle, les jardins du Palais des Tuileries à Paris sont ouverts au public. De même, les jardins de Versailles vont accueillir tous les visiteurs, même le Petit Parc avec ses bosquets et qui s’étend de la terrasse arrière du château jusqu’au bassin d’Apollon et le début du Grand Canal. Suite à de nombreuses dégradations, on va cependant installer des tourniquets à l’entrée de ce Petit Parc en 1680. L’idée étant de ne laisser passer que les personnes à pied et non plus les chevaux et voitures qui dégradaient les jardins. Mais en 1685, l’accès va finalement être fermé et réservé au Roi, à ses proches, aux courtisans et à leurs invités pour éviter les vols et les dégradations. Le Petit Parc ne sera rouvert qu’à la fin du règne du Roi Soleil dans les années 1700.


Revenons à l’Appartement Intérieur du roi. Dès 1735, Louis XV choisit de réaménager l’ancien appartement-musée de son arrière-grand-père et d’y apporter de nombreuses modifications afin de le transformer en un petit appartement au décor raffiné, intime et inaccessible au public. Pour cela, il va faire appel à l’architecte Ange-Jacques Gabriel et aux savoir-faire des meilleurs artisans : mobilier réalisé par les plus grands ébénistes (Jean-François Oeben, les frères Stodtz, Antoine Robert Gaudreaus, Jean-Henri Riesner…) ; boiseries de Jacques Verberckt ; soieries lyonnaises ; porcelaine de la manufacture royale de Sèvres ; tapis de la manufacture royale de la Savonnerie…


Point anecdote ! Qu’appelle-t-on le style Louis XV ?

Ce style de décoration et d’aménagement intérieur nait sous le règne de Louis XV (1715-1774) et se situe plus particulièrement entre 1725 et 1760. Le style classique et inspiré de l’Antiquité de son arrière-grand-père Louis XIV disparaît pour un style qu’on appelle rococo en Europe (en référence à ce mouvement né en Italie dans les années 1720) ou rocaille en France, ou encore Pompadour en référence à la favorite du Roi, Madame de Pompadour (1721-1764). Cependant, c’est une erreur car si elle influence les décors et le mobilier, Madame de Pompadour sera plutôt l’initiatrice d’un style néo-classique qui fera ce qu’on appelle le style Louis XVI, mais qui commencera donc avant le règne dudit Louis XVI (1774-1793). Alors que la fin de règne de Louis XIV est marquée par la rigueur et l’austérité, la période de régence qui suit (Louis XV n’a que 5 ans et ne peut régner avant sa majorité fixée à 13 ans, donc en 1723. C’est Philippe, duc d’Orléans et neveu de Louis XIV qui sera alors le Régent) lance la mode d’un style plus intime et luxueux. La rigueur de la vie de représentation royale fait place à une vie de plaisirs.

Quand Louis XV commence réellement son règne et épouse Marie Leszczynska en 1725, la création d’Appartements Intérieurs plus privés dans les résidences royales comme Versailles ou Fontainebleau va imposer des décors luxueux, élégants et raffinés, mais aussi confortables et accueillant pour une vie intime paisible. La courbe est à l’honneur. On s’inspire de la nature (les feuillages entrelacés, les oiseaux, ou encore la coquille qui, avec ses courbes, est l’ornement rocaille par excellence), mais aussi de l’art oriental à la mode, notamment chinois. On oublie la géométrie des styles précédents. Le style rocaille ou rococo est un baroque poussé à l’excès, asymétrique, avec des brillances, des volumes tourmentés, contorsionnés ou torsadés, et où le décoratif domine sur le reste. Il y a peu de logique dans le rococo. On travaille le mobilier comme de la haute couture : peu importe la forme du meuble, on va chercher à l’ennoblir à coup d’ornements. L’harmonie d’un meuble ou d’une pièce se fait dans l’abondance d’apparat et d’ornementation. Derrière les détails sculptés, peints ou dorés, le fonctionnel s’efface. On s’amuse à cacher les tiroirs, par exemple, et on invente alors des mécanismes ingénieux pour ouvrir tel volet, tel casier ou telle porte dissimulée derrière les décors.

Alors, comment reconnaître le mobilier Louis XV ? à ses courbes et à son confort. Les dossiers s’arrondissent, les pieds se galbent, on intègre les ressorts dans les assises… Pour les appartements plus privés, on invente du mobilier plus petit et adapté : le fauteuil bergère avec son haut dossier à oreilles et son assise large et basse ; le cabriolet au dossier incurvé et en forme de violon ; la chiffonnière (meuble haut à trois tiroirs) ; la poudreuse ou table de toilette ; les petites tables dont la table de chevet ou la table haricot en raison de sa forme ; ou encore le bureau à cylindre dont le mécanisme permet de nombreuses cachettes; et les commodes d’angle, typiques du style Louis XV et qu’on ne retrouvera plus sous Louis XVI. On va chercher de nouveaux bois : l’acajou apparaît, le chêne, le noyer et le prunier sont à l’honneur… mais le plus important est l’avènement du laquage et du placage des meubles, avec le développement du travail minutieux de la marqueterie qui se complexifie. On utilise alors des essences exotiques comme l’acajou rouge, bien sûr, mais aussi l’amarante et le palissandre violet, ou encore le santal jaune et le gaïac vert. La polychromie est de mise sous Louis XV pour une décoration intérieure joyeuse. C’est le cas pour les boiseries et les moulures des appartements qui prennent souvent des tons pastel, relevés par des couleurs sombres comme le vert ou le rouge, mais aussi, bien entendu, par des dorures, l’or étant au cœur de ce style rocaille. Le trompe-l’œil fait aussi son apparition comme les décors de fausses bibliothèques sur les murs et les portes. Parmi les noms connus du style rocaille: les ébénistes Jean-François Oeben et Antoine Gaudreaus, ou encore le menuiser Jacques Verberckt célèbre pour ses boiseries.

A partir de 1748, la découverte des sites de Pompéi et Herculanum en Italie va développer le goût de l’Antique et mettre de côté le rococo. Madame de Pompadour elle-même fait envoyer une mission pour étudier les vestiges gréco-romains. Un style néo-classique aux lignes droites et géométriques, inspiré des arts grec et romain gracieux et symétriques, va peu à peu s'imposer. Le style Louis XVI va naître de ce nouveau courant.


Revenons à l’Appartement Intérieur du Roi. A la mort de Louis XV le 10 mai 1774, c’est son petit-fils qui lui succède. Louis XVI, s’il agrandit un peu le petit appartement dont il a hérité, ne le modifiera que très peu, préférant garder l’aménagement souhaité par son grand-père. Pour information, la nouvelle reine Marie-Antoinette appréciera et réaménagera également les cabinets intérieurs de la reine, hérités de Marie Leszczynska, l’épouse de Louis XV, qui les avaient réaménagés entre 1728 et 1748.


L’appartement intérieur du roi est situé au premier étage du château, dans l’aile Nord réservée au souverain (l’aile Sud ou du Midi étant pour la reine et les enfants de France). Il se trouve autour de la cour des Cerfs (une cour intérieure décorée de têtes de cerfs sculptés), à l’arrière et en parallèle du Grand Appartement du Roi qui donne, lui, sur les jardins et les extérieurs du château. Ainsi, par de simples portes ou d’étroit passages dédiés, le souverain pouvait passer rapidement des pièces d’apparat à ses espaces privées.


Dans ce petit appartement, Louis XV comme Louis XVI inviteront leurs conseillers pour travailler en toute discrétion ; ils y recevront aussi une société choisie pour des parties de jeux, des moments de discussion intimes ou des repas en petit comité comme le souper dit au « petit couvert » qui n’accueillait que les proches et les intimes par opposition au souper au « Grand Couvert » qui imposait à la famille royale de manger en public dans l’antichambre du Grand Appartement du Roi.


Maintenant que vous en savez plus sur l’origine de l’appartement intérieur du roi à Versailles, je vous propose, en invité.e.s privilégié.e.s que nous sommes, d’y entrer et de découvrir ces lieux peu connus du public.


Visite du petit appartement du roi


Notre visite commence par l’aile nord des ministres où nous retrouvons notre guide. Pour rappel, ces deux ailes, qui se trouvent de part et d’autre de la « cour d’honneur » ou « cour des ministres », ont été construites par l’architecte de Louis XIV, Jules Hardouin-Mansart, entre 1679 et 1681 pour accueillir les ministres et secrétaires d’Etat et leurs familles.

De là, nous repassons par la cour d’honneur puis entrons dans la Cour Royale qui se trouve derrière la superbe Grille Royale, toute dorée qui a été mise en place entre 1679 et 1682 avant d’être détruite en 1794 pendant la Révolution, puis reconstruite récemment entre 2005 et 2008.


Nous sommes donc dans la Cour Royale. A gauche, au Sud, se trouve la Vieille-Aile datant de 1662 et qui accueille les appartements de la Reine auxquels on accède par le célèbre escalier de la Reine (le plus fréquenté de Versailles à l’époque). A droite, au Nord, se trouve l’aile de Gabriel (en référence à l’architecte du Roi Ange-Jacques Gabriel) qui date de 1771-1774 et qui donnait sur le magnifique escalier des ambassadeurs construits pour Louis XIV entre 1672 et 1679 pour y accueillir les ambassadeurs étrangers. Il sera détruit en 1752 par Louis XV pour y bâtir les appartements de ses filles.

Enfin, au-delà de la Cour Royale se trouve la célèbre Cour de Marbre entourée de ce qu’on appelle le Château Vieux, c’est-à-dire le bâtiment originel créé par Louis XIII et conservé par Louis XIV qui, en mémoire de son père, l’intègrera et l’enveloppera littéralement dans l’architecture de son nouveau et majestueux palais.


Point anecdote ! Puisque nous parlons des différentes cours, saviez-vous qu’elles n’étaient pas accessibles à tous ?

En effet, pour pouvoir entrer dans la Cour Royale, tout d’abord, que ce soit à pied, à cheval ou en carrosse, il faut y être invité… on dit qu’il faut les « honneurs du Louvre ». Pourquoi du Louvre alors qu’on est à Versailles ? Et bien parce qu’historiquement, le Louvre est la résidence royale principale, puisque je rappelle que la cour de France ne s’installe à Versailles qu’en mai 1682. Aussi, la tradition et le nom sont restés pour signifier que l’on a bien reçu une invitation royale. On peut alors pénétrer dans cette enceinte privilégiée et par exemple assister à la messe en présence du Roi. En ce qui concerne la Cour de Marbre, en revanche, elle n’était réservée qu’à la famille royale.


Revenons à notre visite. Pour accéder à l’Appartement Intérieur du Roi, à moins que vous ne soyez le souverain lui-même, vous ne pouvez passer par les portes dérobées et autres passages intérieurs qui relient le Grand Appartement et le Petit Appartement. Il vous faut en réalité entrer par l’extérieur, par l’aile nord au niveau de la Cour Royale, en empruntant l’une des portes sous les trois arcades fermées par des grilles dorées qui s’y trouvent et qui ouvraient sur l’escalier des ambassadeurs. Nous sommes donc dans le vestibule des ambassadeurs qui, lui existe toujours.


Nous continuons sur la gauche pour entrer dans la petite salle des gardes du Roi.

Dans cette pièce, résidaient des gardes du corps qui défendaient l’accès à ce qu’on appelle le «petit degré du Roi», c’est-à-dire à l’escalier qui menait directement à l’Appartement Intérieur du souverain.


Point anecdote ! Savez-vous que le 5 janvier 1757, Louis XV échappe à un assassinat en sortant de cette salle des gardes ?

Ce soir-là, vers 18 heures, le Roi descend de son Petit Appartement, accompagné du Dauphin son fils, du capitaine des Gardes du roi, des Grands et Petits écuyers et du colonel des Gardes Suisses. Alors qu’il s’apprête à sortir de la salle des gardes, un individu le frappe violemment. Il est immédiatement arrêté tandis que Louis XV, qui pense qu’on lui a seulement donné un coup de poing, porte sa main à son côté droit. A la vue du sang, il comprend : il a été poignardé. On le transporte dans sa chambre et on l’allonge. Pensant qu’il va mourir, le Roi demande un prêtre et confie le royaume au Dauphin. L’assassin est Robert-François Damiens. Âgé de 42 ans, ce domestique originaire d’Arras a travaillé pour plusieurs conseillers parlementaires. A force d’entendre ces derniers critiquer la relation de Louis XV avec sa favorite Madame de Pompadour, Damiens, qui est influençable, va vouloir régler le problème en éliminant ce Roi volage. Arrêté, il sera emmené à la Conciergerie où il sera jugé du 12 février au 26 mars 1757. Interrogé sous la torture pour savoir s’il avait des complices, il sera condamné à mort, écartelé et brûlé, accusé du crime suprême : celui de « parricide commis sur la personne du roi ». Un crime de lèse-majesté, donc.


Après cette anecdote, je vous propose de poursuivre notre visite en empruntant justement le petit degré du Roi. Nous nous retrouvons donc au premier étage, dans ce qu’on appelle l’antichambre des Chiens. Pourquoi ce nom ? C’est très simple : parce que Louis XV aimait y faire dormir ses chiens. Le décor le rappel encore aujourd’hui, mais à l’époque, on y trouvait également des niches. Les boiseries proviennent de l’ancienne salle de Billard de Louis XIV qui se trouvait à l’emplacement de l’actuel chambre du Roi dans son Petit Appartement (je vous y emmène plus tard). Cette antichambre servait, comme son nom l’indique, de salle d’attente pour les invités du Roi.

Par la porte de gauche, nous entrons dans la salle à manger dite « des Retours de chasse ». Jusqu’en 1750 et depuis le début de son règne, Louis XV utilisait cette pièce pour ses bains. Par la suite, ce petit appartement des Bains est transformé en salle à manger où, deux à trois fois par semaine, le Roi recevait à souper les hommes et femmes qui l’avaient accompagné à la chasse dont il était un grand amateur. Une table très courue par les courtisans, vous vous en doutez.

Point Anecdote ! Comment être invité « au débotté » chez le Roi ?

Tout se passe quand le Roi rentre de la chasse. Il passe par la Cour de Marbre, monte dans son Grand Appartement, et s’installe dans le Cabinet du Conseil. Là, on lui enlève alors ses bottes de chasse. C’est à cette occasion que Louis XV décide de lancer les invitations pour le souper (nitre dîner à nous) du soir-même, organisé dans la salle à manger des Retours de chasse de son Petit Appartement. Les valets de l’appartement, appelés « Livrées Bleues » ou « Garçons Bleus » en référence à la couleur de leur livrée (leur manteau si vous préférez) notent sur des papiers les noms des homes et femmes présents qui souhaitent se faire inviter. Le Roi profite d’être assis pour qu’on lui ôte ses bottes pour choisir les convives du soir. Ainsi est née l’expression « être invité au débotté »… Il s’agit à l’origine du débotté du Roi !


Nous sommes toujours dans la salle à manger des Retours de chasse. Une pièce des buffets attenante permettait de ranger tout le nécessaire (mobilier, couverts…), et les plats étaient descendus du troisième étage où se situaient les cuisines particulières du Roi. Après la mort de Louis XV, son successeur louis XVI y exposera la vaisselle d’or hérité de son grand-père, mais aussi différents objets comme cet imposant baromètre en bronze sculpté entre 1772 et 1775 par Joseph Lemaire.


Quittons la salle à manger et gagnons la chambre du Roi en repassant par l’antichambre des Chiens et en traversant le Cabinet de la Pendule sur lequel je reviendrai ensuite. Nous sommes maintenant dans la chambre du Roi, dite « nouvelle chambre » en opposition à sa Grande Chambre officielle qui se trouve dans son Grand Appartement et qui est ouverte à toutes et tous, notamment pour assister au lever et au coucher du souverain.

Avant que Louis XV ne la transforme en chambre privée, cette pièce était la salle du Billard de Louis XIV. Pour combler son besoin d’intimité, et parce que sa Grande Chambre est bien froide l’hiver, Louis XV fera de l’ancienne salle de Billard sa chambre en 1738. Il y dormira la plupart du temps, continuant cependant à utiliser la Grande Chambre d’Apparat pour les cérémonies officielles. Son premier valet de chambre venait alors le réveiller pour qu’il puisse s’introduire dans sa chambre publique avant que les courtisans et autres personnalités invitées n’y soient entrées.

D’ailleurs, cette « nouvelle chambre » se situe à l’extrémité du Petit Appartement, et par une porte à gauche de la cheminée, elle donne sur le Cabinet du Conseil, où le Roi tenait conseil, donc, avec ses ministres et secrétaires d’Etat. Ce Cabinet du Conseil donne, lui, directement sur l’autre chambre du Roi : la Grande Chambre d’Apparat. Vous voyez qu’en installant sa petite chambre ici, Louis XV pouvait facilement et rapidement rejoindre les espaces officiels et les lieux d’exercice de son pouvoir.


Sachez que c’est dans la chambre de son Petit Appartement que Louis XV est mort de la petite vérole (ou variole) le 10 mai 1774.


Point anecdote ! Savez-vous qu’il y avait une règle spécifique pour répartir les biens présents dans la chambre du Roi à sa mort ?

En effet, quand le Roi meurt, la tradition veut que ce soit son premier valet de chambre qui hérite de tut ce qui se trouve dans la pièce. A la mort de Louis XV qui est mort de la variole, son valet craint d’être contaminé. Il va alors décider de les entreposer loin de chez lui avant de les vendre.


Après Louis XV, son petit-fils Louis XVI continuera de dormir ici et de ne fréquenter le lit d’apparat que pour lles cérémonies officielles. Le lit que l’on peut observer ici n’est pas celui d’origine. Il est d’ailleurs actuellement en construction et je n’ai pu le voir. Il faudra donc que je revienne !


Point Anecdote ! savez-vous pourquoi peu de lits royaux sont parvenus à nous ?

En réalité, à la cour de France, contrairement à d’autres cours européennes, la marque du pouvoir royal n’est pas incarnée par le trône, mais par le lit du Roi. En effet, c’est dans sa chambre d’apparat, et dans son lit, et non dans la salle du trône, que s’organisent els cérémonies du lever et du coucher du Roi qui marquent le début et la fin de la journée de la cour, comme le lever et le coucher du soleil marquent le début et la fin du jour. Symbole ultime du pouvoir royal, donc, les lits des rois ont été en grande majorité détruits et brûlés pendant la Révolution. Il a donc fallu les reconstituer d’après les archives. Concernant le reste des meubles, ils ont été inventoriés et revendus pendant la Révolution, toujours, mais comme les noms des acheteurs ont tous été répertoriés, il a été plus simple de les retrouver et de les racheter plus tard au fur et à mesure.


Pour le reste de la chambre, on y trouve du mobilier ayant appartenu à Louis XV ou Louis XVI mais qui provient pour la plupart du château de Compiègne ou de Saint-Cloud. Les meubles originaux, comme la superbe commode qui se trouvait face à la cheminée sous Louis XV et qui a été remplacée par la commode de la chambre de Louis XVI du château de Compiègne, ont été dispersés. La fameuse commode de Louis XV se trouve ainsi aujourd’hui à la Wallace Collection de Londres. Au-dessus des portes, Louis XV qui était un père aimant et attentionné, a fait installer les portraits de Mesdames ses filles.


Point Anecdote ! Pourquoi les filles de Louis XV portaient-elles des numéros ?

Tout d’abord, il faut savoir qu’à la différence de filles célibataires de la noblesse qu’on appelait des Demoiselles, les filles de France (filles des rois et reines de France, donc) étaient appelées Mesdames. Chacune portait le titre de Madame, suivi de son prénom, sauf pour l’aînée qu’on appelait uniquement « Madame ». Louis XV et la reine Marie Lescszynska auront 10 enfants en 10 ans dont 8 filles. Or, à l’époque, on ne nommait les enfants qu’à l’occasion de leur baptême. A la cour de France, les enfants ne sont baptisés qu’entre 9 et 11 ans. Aussi, les filles du Roi et de la Reine vont porter des numéros jusqu’à ce qu’un prénom leur soit donné. On les désignait alors par les appellations "Madame Première , Madame Seconde, Madame troisième", etc… Quand l’une se mariait ou malheureusement décédait, les suivantes remontaient alors d’un rang.

En ce qui concerne Louis XV, vous aviez ainsi :

  • Louise-Élisabeth de France (1727 - 1759), Madame, puis Madame-Infante après son mariage en 1739

  • Henriette de France (1727 - 1752), la jumelle de Madame, titrée Madame Seconde, puis Madame au mariage de sa sœur en 1739

  • Marie-Louise de France (1728 - 1733), Madame Troisième

  • Marie-Adélaïde de France (1732 - 1800), Madame Quatrième, puis Madame Troisième, puis Madame Adélaïde et enfin Madame à la mort de Madame Henriette (1752)

  • Victoire de France (1733 - 1799), Madame Quatrième puis Madame Victoire

  • Sophie de France (1734 - 1782), Madame Cinquième puis Madame Sophie

  • Thérèse-Félicité de France (1736 - 1744), Madame Sixième

  • Louise de France (1737 - 1787), Madame Septième, qu’on appelait aussi Madame Dernière puisqu’après sa naissance, Louis XV et Marie Leszynsca vont vivre séparés et donc ne plus avoir d’enfants. Madame Septième sera ensuite nommée Madame Louise, puis Mère Thérèse de saint Augustin après son entrée au Carmel de Saint-Denis en 1770.

Après ce long moment passer dans la chambre de l’Appartement Intérieur du Roi, entrons maintenant dans une autre pièce remarquable : le Cabinet de la Pendule. Créée en 1735 par Louis XV en lieu et place de l’antichambre et d’une partie du cabinet des tableaux de Louis XIV, c’est la plus grande salle du Petit Appartement. Elle est surtout connue pour la superbe pendule astronomique qui lui a donné son nom. Réalisée par l’ingénieur Claude Siméon Passemant, l’horloger Louis Dauthiau et le bronzier Jacques Caffieri, cette pendule indique la date, l’heure, les phases de la Lune et le mouvement des planètes. On peut donc savoir le jour et l’heure qu’il est, bien sûr, mais aussi comment sont positionnés la Lune et l’ensemble des planètes du système solaire. Sachez qu’elle a été fabriquée pour pouvoir marcher jusqu’en… 9999, et qu’à l’exception de la révolution des planètes, le mécanisme fonctionne encore !

Si la pendule est encore visible aujourd’hui, à l’emplacement qu’elle occupait avant la Révolution, c’est qu’elle n’a pas été vendue pendant les ventes révolutionnaires. Comme beaucoup d’objets scientifiques qui ont été gardés pour leur utilité, elle a été conservée pour sa grande valeur scientifique. Au centre, la statue équestre de Louis XV en bronze est la réduction de la statue du Roi réalisée par Edme Bouchardon et qui devait trôner au centre de la place Louis XV, devenue la place de la révolution où la guillotine était installée, puis à partir de 1795 et jusqu’à aujourd’hui, la place de la Concorde. Le Cabinet du Pendule servait de seconde antichambre de l’Appartement Intérieur, mais il se transformait aussi en salle de jeux où Louis XV aimait recevoir ses invités après le souper au petit couvert.


Suivez-moi maintenant dans une pièce chère au Roi : le cabinet intérieur ou cabinet d’Angle. C’est ici que Louis XV travaillait dans la journée, seul ou avec un ou plusieurs ministres. C’est l’une des pièces le plus belles du Petit Appartement et un témoignage parfait du style Rocaille de l’époque. Je dois dire que sa récente rénovation est très réussie et qu’on comprend bien pourquoi le Roi aimait y passer ses journées. Les meubles élégants et raffinés sont ceux qui se trouvaient ici au temps de Louis XV, comme la commode médailler d’Antoine Robert Gaudreaus, réalisée en 1738, ou les encoignures de Gilles Jouverts, installées en 1755. Parmi eux, on ne peut manquer le chef-d’œuvre de cette pièce : le secrétaire à cylindre du Roi, conçu par Jean-François Oeben et finalisé par Jean-Henri Riesner entre 1760 et 1769. Il aura donc fallu 9 ans pour créer ce meuble unique, l’un des plus célèbres du château, dont le mécanisme ingénieux et subtile permettait au Roi de fermer l’ensemble des tiroirs grâce une seule serrure cachée. D’ailleurs, saurez-vous la retrouver ? Elle se trouve au niveau du ruban que l’on peut apercevoir. Le seul accès qui était ouvert à tous se trouve sur le côté droit. Cette ouverture servait aux livrées bleues (les personnes au service du roi) de remplir les encriers du bureau.

Prenez le temps de bien l’observer si vous visiter cette pièce car c’est un meuble vraiment remarquable. Sachez enfin que c’est dans cette pièce que Louis XVI recevra les délégations américaines et décidera de financer la guerre d’indépendance d’Amérique. En souvenir, un candélabre en bronze agrémenté des sept navires envoyés par la France, et exécuté par Pierre Philippe Thomire en 1783, rappelle le rôle de la France dans la création des Etats-Unis d’Amérique.


A partir du cabinet d’Angle, nous gagnons ensuite l’arrière cabinet ou cabinet des Dépêches. Sous Louis XIV, cette pièce n’existait pas. On trouvait ici le Salon Ovale qui donnait sur la Petite Galerie qui était en fait une version réduite de la Galerie des Glaces, et sur le cabinet des Coquilles, appelé ainsi à cause de ses décors et où le Roi Soleil conservait ses livres précieux et d’autres tableaux de grande valeur comme la célèbre Joconde de Léonard de Vinci. Ce cabinet des Coquilles est transformé en 1754 par Louis XV en degré du Roi (l’escalier qui monte au Petit Appartement) et le Salon Ovale devient donc le cabinet des Dépêches. C’est une pièce importante puisque c’est ici que se tient le « Secret du Roi », c’est-à-dire la, gestion de sa diplomatie personnelle. C’est dans ce cabinet des Dépêches que Louis XV étudie les rapports de ses agents secrets en provenance de l’étranger, c’est là qu’il gère sa politique internationale et qu’il donne ses ordres à travers les dépêches qu’il envoie… d’où le nom. Sachez que tous les documents et livres du Roi ont été conservés à la Révolution. Ces archives ont été envoyées et entreposées à l’hôtel de Soubise à Paris, l’actuel hôtel des archives nationales, tandis que les œuvres royales ont, elles, été transportées au Louvre, et que le mobilier royal non vendu s’est retrouvé conservé au mobilier national.


Attenant au cabinet des Dépêches se trouve une petite pièce essentielle : le cabinet de la Chaise… autrement dit les toilettes du Roi avec sa chaise percée.

Sous Louis XIV, l’Appartement Intérieur s’arrêtait avec cette pièce qui donnait également sur l’escalier des Ambassadeurs. En 1752, Louis XV va remplacer cet escalier et une partie de la Petite Galerie de son arrière-grand-père pour construire un appartement pour sa fille Madame Adélaïde, qui devient Madame Première à la mort de sa sœur Henriette. Mais quand Madame Adélaïde décide de rejoindre ses sœurs dans leurs appartements du rez-de-chaussée en 1769, Louis XV récupère ces espaces pour agrandir son Petit Appartement.


Nous entrons alors dans l’ancien cabinet intérieur de Madame Adélaïde devenu ensuite une salle d’exposition de la vaisselle d’or de Louis XV, puis sa salle des bains, avant d’être transformée en cabinet par Louis XVI qui y recevait en cercle très restreint. De l’ancienne Petite Galerie de Louis XIV, on retrouve quelques boiseries comme celles des corniches ; du cabinet de Madame Adélaïde qui y pratiquait la musique, on retrouve des panneaux sculptés d’instruments de musique réalisés par Jacques Verberckt ; et de Louis XVI on peut observer un superbe médailler en ébène et acajou dont l’originalité -et la fragilité- réside dans ses panneaux de cire d’abeille incrustée de plumes ou de fleurs séchées. Par une petite porte dissimulée, un petit couloir permettait à Louis XV de rejoindre les appartements de sa célèbre favorite, Madame de Pompadour (1721-1764). Cette porte donne aussi sur l’ancien cabinet des bains que Louis XV construit en 1773, un an avant sa mort, et qui devient le cabinet de Retraite de Louis XVI qui peut ici travailler seul et au calme. Notre guide ne nous y a malheureusement pas emmenés. Sachez que cette porte donne également aujourd’hui sur l’escalier Louis-Philippe, construit par le roi des Français Louis-Philippe 1er (1773-1850) au 19e siècle.


Nous empruntons alors une autre porte qui mène directement dans la bibliothèque du Petit Appartement. Cette bibliothèque semi privée (il y en a une plus privée encore dans les combles) date de Louis XVI. Sous Louis XIV, c’était une autre partie de la Petite Galerie, et sous Louis XV, ce fut tour à tour la chambre de Madame Adélaïde puis un salon de jeux pour el Roi. Cette pièce de style Louis XVI, est la dernière pièce réalisée par l’architecte Ange-Jacques Gabriel à Versailles. Vous remarquerez la porte en trompe-l’œil qui, quand elle est fermée, donne l’impression que le mur est entièrement couvert de livres. Cette pièce est assez grande, élégante et très agréable. On s’imagine bien venir ici étudier ou lire en toute tranquillité. J’ai particulièrement aimé la table ronde en bois exotique au centre de la pièce, le très beau secrétaire à cylindre de Louis XVI, et la magnifique commode réalisée par Riesener en marbre, bronze et marqueterie.


Pénétrons maintenant dans une pièce que j’ai particulièrement aimé pour sa luminosité et ses décors doux et très élégants : la salle à manger dite « aux Salles neuves » ou encore « le salon des porcelaines ». Construite par Louis XV en 1769, elle devient la salle à manger des soupers au petit couvert du Roi à la place de la salle à manger que nous avons observée au début de notre visite. Elle sera utilisée comme telle par Louis XVI également. Chaque année, à Noël, cette pièce accueillait une tradition née sous Louis XV et qui se perpétuera sous le règne de son petit-fils : ici et dans les pièces suivantes, on exposait les plus belles porcelaines fabriquées par la manufacture de Sèvres, et la cour, les princes et autres invités pouvaient alors les acheter. Une façon de soutenir financièrement la manufacture royale. C’est d’ailleurs cette tradition qui donnera le surnom de « salon des Porcelaines » à cette pièce. Je vous invite à bien l’observer parce que comme dans la bibliothèque, vous êtes ici dans un véritable décor de style Louis XVI.

Point Anecdote ! Qu’appelle-t-on style Louis XVI ?

Louis XVI (règne 1774-1793) succède donc à son grand-père Louis XV (règne : 1715-1774), dont le style rocaille a marqué le règne par l’asymétrie, les courbes, les volumes tourmentés et l’excès de décors et d’ornementations. Le style Louis XVI, au contraire, emprunte à l’étude et à la découverte des sites de Pompéi et d’Herculanum en Italie, les lignes droites, harmonieuses, géométriques et symétriques. Un goût pour l’Antiquité gréco-romaine, initié par la favorite du roi Louis XV Madame de Pompadour (1721-1764) dès les années 1755, qu’on appellera le style néo-classique.

Le style Louis XVI, qui s’étend en réalité de 1750 à 1795, est donc marqué par le retour à la ligne droite. Une ligne droite loin d’être synonyme de raideur puisque par des jeux de pans coupés ou d’ornementations légères, elle va s’imposer joyeuse et gracieuse. Le style Louis XVI oublie peu à peu l’idée de confort du style Louis XV avec notamment de dossiers de sièges plus droits, en frome de médaillons ou de chapeaux. Si au départ on continue à utiliser le placage et la marqueterie des meubles développés avec le style rocaille, cette technique est peu à peu abandonnée pour laisser place au jeu naturel des veines du bois et permettre de jouer avec les différentes essences, selon leur densité et leur couleur. Le style Louis XVI aime le naturel et la simplicité. La sobriété est de mise, les proportions et les formes des meubles sont équilibrées et géométriques (carrées, ovales, rectangulaires, rondes, en demi-lune). Cependant, on n’oublie pas la fantaisie. Et les ornements restent présents pour ennoblir et enrichir le mobilier, les décors intérieurs et les boiseries : rosaces, médaillons, fleurs, lyres ; guirlandes (répétitions d’un même motif : fleurs, entrelacs, feuillages, croisillons) ; cannelures des pieds de meubles ; les nœuds et rubans sculptés… A l’image du style Louis XV né en partie de la création d’appartements privés et de la volonté de créer un luxe intime, le style Louis XVI invente également du mobilier adapté aux pièces plus petites et intimes des appartements intérieurs du roi : le bonheur du jour (une table ou un secrétaire surmonté d’un casier vitré, de glaces ou de portes en fausse-bibliothèque) ; la vitrine pour exposer ses bibelots ; les commodes en demi-lune, ou en console servante (ouverte de face ainsi que sur les côtés) ; le meuble bibliothèque ; le secrétaire avec un ou deux vantaux…

Le style néo-classique se poursuivra en France bien après Louis XVI, sous le Directoire (1795-1799), le Consulat (1799-1804), le Premier Empire (1804-1815), et jusqu’à la Restauration (1815-1830). Cependant, là où le style Louis XVI interprète l’art antique, l’Empire, par exemple, le pastiche purement et simplement. La fonctionnalité prend le pas sur le confort, et la subtilité laisse place à la lourdeur.


Quittons la salle à manger pour gagner la salle des buffets ou salle de Billard attenante. Les soirs de soupers, on y entreposait la vaisselle comme le matériel et les plats, puis elle se transformait en salle de billard où le Roi et ses convives pouvaient jouer. On peut y observer des vitrines avec de magnifiques pièces de vaisselles en porcelaine de Sèvres. Cette pièce se trouve en lieu et place d’un des paliers de l’escalier des Ambassadeurs de Louis XIV, détruit donc par Louis XV qui en fait la salle des buffets et de billard d’où partait un escalier qui descendait dans les appartements de Madame Adelaïde. Cet escalier a été détruit et remplacé au 19e siècle par l’escalier Louis-Philippe.

Au bout de la salle de billard, on trouve naturellement le salon de Jeux. On ne peut pas y entrer mais on peut facilement l’observer par une double porte ouverte. Cette pièce était autrefois le cabinet des Raretés de Louis XIV qui y exposait ses tableaux les plus précieux et ses médailles d’or. Le Roi Soleil pouvait y entrer avec ses invités privilégiés directement par le salon de l’Abondance situé dans son Grand Appartement. Devenue antichambre de Madame Adélaïde en 1753, cette salle devient une salle à manger (la salle çà manger dite des Seigneurs) en 1769 avant de devenir sous Louis XVI un salon de jeux. Le mobilier que vous observez est en majorité celui d’époque, comme la toile murale cramoisie et or retissée à l’identique.


Nous repassons par la salle des buffets ou du billard et nous empruntons l’escalier Louis-Philippe dont je vous parlais et qui a été construit au 19e siècle en lieu et place de l’escalier de Madame Adélaïde et d’une petite cour intérieure. Avant de descendre, faite le tour du palier. En vous plaçant face à la descente de l’escalier, vous avez : à gauche une porte qui donne sur le salon de Diane du Grand Appartement du Roi, et à droite le cabinet de Retraite de Louis XVI, ancienne salle des Bains de Louis XV, que vous pouvez entrevoir par une fenêtre.


Nous descendons avec notre guide le bel escalier Louis-Philippe et nous retrouvons dans le vestibule des Ambassadeurs, par où nous sommes entrés.


La visite se termine donc ici. Libre à vous ensuite d’explorer ou de redécouvrir les Grands Appartements des souverains et plus largement l’ensemble du château et du domaine de Versailles. Il y a toujours quelque chose de nouveau à observer !


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Mon avis sur cette visite


J’avais déjà pu profiter des visites guidées des espaces privés de Versailles, comme les cabinets intérieurs de la Reine ou le Hameau de la Reine Marie-Antoinette. J’avais beaucoup aimé et avait hâte de découvrir le petit Appartement du Roi. Et je n’ai pas été déçu !


Tout d’abord, notre guide était très agréable, et c’est important. Son discours était très vivant et rempli d’anecdotes comme je les aime. Comme pour les autres visites guidées que j’ai pu faire à Versailles, il y a un vrai plaisir et presqu’une excitation à emprunter les petits couloirs, à pénétrer dans des pièces cachées et intimes, et tout simplement à découvrir les coulisses de Versailles et des endroits inaccessibles au grand public.


Comme vous l'aurez compris, je recommande de faire cette visite. On y apprend beaucoup, et on est émerveillé tout du long.


En revanche, j’ajouterais un bémol. Nous étions un groupe d’environ 10 personnes et je crois que la jauge peut monter à 20. Les espaces sont petits et comme la visite est assez intense, on va parfois un peu trop vite, ce qui ne laisse pas le temps de prendre toutes les photos qu’on souhaite, notamment des photos sans personne dessus. L’autre regret c’est que l’appartement intérieur du Roi est plus grand que ce que nous visitons. Il existe d’autres pièces au 1er étage bien sûr, mais aussi au 2ème et dans l’attique (les combles) que j’aurais aimé découvrir.


Informations pratiques


Pour participer aux visites guidées de Versailles, il vous faut vous munir d’un billet standard d'accès au château, auquel vous ajoutez un billet spécial de visite guidée que vous choisissez sur le site du château. Le coût s’élève à 10 euros supplémentaires en tarif plein.


Toutes les informations sont ici sur le site du château de Versailles.


Sources



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