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LIVRE: "LES SPORTS EN FRANCE DE L’ANTIQUITÉ À NOS JOURS. UNE HISTOIRE, UN PATRIMOINE"

Dernière mise à jour : 16 nov. 2023

Alors que la coupe du monde de Rugby a attiré une foule de supporters et que les Jeux Olympiques de Paris se profilent pour l’été 2024, les éditions du Patrimoine et le Centre des Monuments Nationaux ont publié, ce 2 novembre, un ouvrage inédit qui plaira à la fois aux sportifs, aux amateurs d’architecture et aux passionnés de patrimoine: «Les Sports en France de l’Antiquité à nos jours. Une histoire, un patrimoine», co-dirigé par Franck Delorme -architecte, docteur en histoire de l’art, historien de l’architecture et attaché de conservation à la Cité de l’architecture et du patrimoine- et Pascal Lemaître -photographe du patrimoine architectural français et collaborateur régulier du Centre des monuments nationaux.


On y découvre que l’histoire et l’essor des activités physiques et sportives, qui ont souvent suivi les évolutions de la société et les courants politiques, se sont aussi accompagnés du développement d’infrastructures inédites pour accueillir les sportifs en tout genre. Du gymnase au stade, des arènes antiques aux salles d’armes ou de jeu de paume, en passant par les vélodromes, les hippodromes, les piscines ou les circuits automobile, l’ouvrage témoigne des différentes typologies d’architectures, ordinaires ou exceptionnelles, qui ont émergé au cours de l’histoire pour accueillir les pratiques sportives. Des bâtiments, des espaces et des équipements qui se sont rapidement développés sur l’ensemble du territoire français et qui représentent aujourd’hui un patrimoine remarquable, parfois insoupçonné tant il fait partie de notre quotidien.

Le livre «Les Sports en France de l’Antiquité à nos jours. Une histoire, un patrimoine» nous ouvre ainsi les portes, les pistes ou les bassins de nombreux monuments et espaces dédiés au sport, créés à différentes époques, parmi lesquels: Les arènes de Nîmes et d’Arles, la salle du jeu de paume royal du château de Fontainebleau, le Gymnase Huyghens à Paris (14e arr.), le circuit automobile de Reims, l’hippodrome de Chantilly, la piscine de la Butte-aux-Cailles à Paris (13e), le stade Gerland à Lyon, le Palais des sports, des arts et du travail de Narbonne, le Parc des Princes et le Stade de France, ou encore des patinoires, des salles d’escalade et de glisse (roller, skateboard) plus contemporaines.

Parmi les lieux et monuments présentés dans cet ouvrage inédit, il en est un qui m’a particulièrement marqué: la salle d’armes Coudurier, située dans le 6e arrondissement de Paris, au cœur du Quartier Latin. Créée en 1886 et nommée alors Cercle Saint-André des Arts -qui s’écrivait d’ailleurs, à l’origine, Saint-André des Arcs, comme archers-, il s’agit de la plus ancienne salle d’armes encore en activité de la capitale. Pour rappel, une salle d’armes est dédiée à la pratique de l’escrime et des combats sportifs à l’épée ou au sabre. Celle-ci ne se visite malheureusement pas, à moins de vous laisser tenter par l’apprentissage de cet art sportif qu’est l’escrime, mais vous pourrez la retrouver présentée dans le livre.

Reprise en 1893 par le maître d’armes Alexandre Coudurier puis par son fils Maurice de 1913 à 1970, la salle d’entraînement prend alors le nom de salle d’armes Coudurier, un nom qu’elle gardera jusqu’à aujourd’hui. Depuis septembre 1970, elle est dirigée par le maître d’armes Jean-Pierre de Pinel de la Taule. Un homme habité par la passion de l’escrime et engagé pour la transmission du savoir-faire, des valeurs et de la culture de cette discipline séculaire qui, pour lui, bien plus qu’un sport, relève véritablement de l’art. Une personnalité passionnante que j’ai pu rencontrer et dont je vous propose de retrouver l’interview ci-après et en podcast.


INTERVIEW

Jean-Pierre de Pinel de la Taule, maître d’armes de la salle Coudurier à Paris.

Bonjour maître. Merci de nous accueillir ici chez vous, dans la salle d’armes Coudurier. C’est un espace vraiment remarquable de notre patrimoine que peu de gens doivent connaître, j’en suis certain, à part, bien entendu, les passionnés de la belle escrime comme vous et vos élèves.


  • Alors avant toute chose, et pour que les auditeurs comprennent bien de quoi on parle ici, pouvez-vous définir ce qu’est une salle d’armes, sa fonction et ce qu’on y fait précisément ?

La salle d’armes servait autrefois à préparer aux duels. Pour s’entraîner, on faisait appel à un maître d’armes équipé pour former les élèves et les futurs duellistes. Les entraînements au combat se faisaient soit à domicile, soit dans une salle d’armes comme ici, à la salle Coudurier.


Aujourd’hui, dans les salles d’armes, il ne s’agit plus de se préparer au duel, mais de pratiquer l’escrime, une activité physique à mi-chemin entre art et sport. Elle peut être, pour certain, un art avant d’être un sport, ou inversement, mais il faut, à mon sens, qu’il y ait les deux aspects réunis, artistique et sportif, pour comprendre et apprécier cette discipline. C’est en quelque sorte un art sportif.


  • Bâtie dans la seconde moitié du 19e siècle, la salle d’armes Courdurier est la plus ancienne salle d’armes de Paris. Pouvez-vous raconter les grandes lignes de son histoire ?

La salle Coudurier a été créée à la fin des années 1880. Elle a été dirigée par Alexandre Coudurier puis par son fils Maurice, jusqu’en 1970. J’ai repris le flambeau depuis septembre 1970 et je suis donc la 3e génération de maître d’armes ici.


  • Vous êtes maître d’armes. Pouvez-vous expliquer ce que cela signifie exactement, et quel est votre rôle au sein de la salle d’armes où nous nous trouvons ?

C’est simple, le rôle du maître d’armes est de former ses élèves à l’escrime. C’est un formateur qui transmet la culture et la technique de cette discipline.


  • On vient donc ici pour pratiquer l’escrime sportive, une discipline séculaire. Pouvez-vous présenter brièvement son histoire, ses origines et ses évolutions ?

L’Escrime est partie d’Espagne à la fin du Moyen-Âge. Elle est passée ensuite en Italie via le sud de la France ; et à la Renaissance, cette discipline est revenue en France où elle a explosé. Pendant des siècles, les Français et les Italiens ont été les deux peuples les plus réputés en matière d’escrime, avec la pratique la plus répandue d’Europe.


Au départ, les duels se faisaient à l’épée. Mais souvent, les deux adversaires s’empalaient mutuellement et les combats faisaient plus de morts que de vainqueurs, notamment chez les militaires ou les aristocrates, souvent grands adeptes des duels. Aussi, face au risque de voir les meilleurs éléments de l’armée ou de la noblesse s’éteindre les uns après les autres, au 17e siècle, sous le règne de Louis XIV, on va réfléchir à une méthode qui permet de n’avoir plus qu’un seul mort et non plus deux victimes à chaque duel. Le fleuret est né à cette époque. Le principe du fleuret est de parer l’attaque, donc de se protéger, avant de porter la riposte pour atteindre et vaincre son adversaire.


  • L’escrime est donc un art sportif qui se pratique depuis des siècles, et, il est vrai que lorsque l’on parle d’escrime, on pense souvent aux mousquetaires ou aux duels du passé. Dans ce sens, pouvez-vous donner quelques exemples de caractéristiques -valeurs, rituels ou gestes- qui perdurent aujourd’hui encore dans l’escrime contemporaine, et qui sont directement issus de cette escrime historique ?

L’esprit d’honnêteté et de respect qui caractérise l’escrime est resté le même depuis des siècles. Ainsi, lors des combats, c’est celui qui est touché qui annonce sa touche à l’arbitre et qui déclare donc les points gagnés par son adversaire. Vous voyez qu’ici, le respect et la confiance mutuels sont des valeurs essentielles dans la bonne pratique de l’escrime.


Bien sûr, aujourd’hui, les scores sont comptés de manière électrique (chaque touche de l’adversaire est aujourd’hui signalée électriquement), mais il existe encore des salles d’armes, comme la salle Coudurier, où l’on continue à suivre ces règles séculaires de respect et d’honnêteté mutuels.


Une autre tradition qui perdure encore se déroule à la fin du combat. Lorsqu’il est désigné vainqueur, le gagnant du duel offre une touche au perdant. D’abord, il le salue, puis il s’adresse à lui en disant « la vôtre », c’est-à-dire qu’il lui permet de lui mettre une dernière touche pour qu’il ne finisse pas sur un échec. C’est vraiment le summum du respect et de l’esprit ‘fair-play’ du sport.


Maître de Pinel de la Taule, je vous remercie pour cet échange instructif et passionnant.

Je suis certain que les personnes qui me suivent auront beaucoup appris sur l’escrime et son histoire grâce à vos explications, et peut-être que des vocations vont naître.


INFORMATIONS PRATIQUES


Le livre «Les Sports en France de l’Antiquité à nos jours. Une histoire, un patrimoine», publié aux Editions du Patrimoine, est sorti en librairie le 2 novembre 2023.


Pour en savoir plus sur la salle d’armes Coudurier, rendez-vous sur son site internet.


SOURCES

  • Le livre «Les Sports en France de l’Antiquité à nos jours. Une histoire, un patrimoine», Editions du Patrimoine

  • Dossier de presse du livre «Les Sports en France de l’Antiquité à nos jours. Une histoire, un patrimoine», Editions du Patrimoine

  • Interview de Maître de Pinel.

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