Lorsque les Parisiens cherchent à se loger, ils sont nombreux, aujourd’hui encore, à souhaiter s’installer dans un immeuble dit «haussmannien» à l’architecture typiquement parisienne.
Mais en réalité, ce terme n’est pas toujours utilisé à bon escient, et l’architecture haussmannienne imaginée par le préfet de la Seine, Georges-Eugène Haussmann (1809-1891), répond en réalité à des critères strictement définis.
Tout commence il y a 170 ans, en 1853, lorsque l’empereur Napoléon III (1808-73) mandate le Baron Haussmann pour lancer de grands travaux qui doivent moderniser l’urbanisme français et faire en particulier de Paris la capitale prestigieuse d’un Second Empire fastueux (1852-70).
Avant Haussmann, les immeubles parisiens ne sont pas réellement réglementés. Leurs façades sont étroites, et l’ordre et la fonction des pièces n’est pas déterminées, notamment parce que sans point d’eau, toutes les pièces se ressemblent et sont interchangeables.
Avec les travaux commandés par Napoléon III, tout change. Les logements insalubres qui bordaient les rues et les ruelles de Paris sont démolis, et entre 1853 et 1868, ce ne sont pas moins de 18000 maisons sur les 30770 que la capitale comptait alors qui sont abattues, soit plus de la moitié. On bâtit à la place des immeubles modernes dans un style harmonisé qu’on qualifiera plus tard d’architecture haussmannienne.
Ainsi, grande nouveauté, et véritable progrès pour l’époque: les immeubles d’Haussmann sont reliés au tout-à-l’égout, et ils vont peu à peu être équipés d’accès au gaz, pour se chauffer et s’éclairer, mais aussi à l’eau courante (entre 1865 et 1875), là où auparavant, on devait louer les services de porteurs d’eau.
D’un point de vue administratif, les immeubles haussmanniens sont des immeubles à loyer, c’est-à-dire qu’ils appartiennent à des promoteurs et spéculateurs immobiliers qui vont percevoir des loyers de la part de leurs locataires. Cependant, si les investisseurs sont nombreux, l’architecture des bâtiments dont ils sont propriétaires doit répondre à un cahier des charges bien précis, défini par Haussmann lui-même -certainement sous l’œil rigoureux de l’empereur. Il s’agit avant tout de donner aux voies rectilignes -boulevards et avenues- tout juste tracées à Paris un visage harmonieux grâce à un enchaînement d’immeubles parfaitement alignés et cohérents en termes de style.
Les nouveaux immeubles doivent d’abord être réalisés en pierre de taille avec, selon le standing et selon les étages, plus ou moins de moulures, de frontons et de corniches. En effet, alors que l’ascenseur n’est pas encore d’actualité, c’est un privilège d’occuper les étages bas. Ainsi, moins vous êtes élevé socialement, plus vous montez dans les étages, et plus les hauteurs sous plafond sont faibles, et moins les appartements sont décorés. Tout cela changera avec l’arrivée de l’ascenseur en 1870.
Ensuite, pour un même ensemble de bâtiments, les lignes des façades doivent être semblables, et les étages doivent être du même nombre -avec un maximum de six étages- et de la même hauteur -une hauteur proportionnelle à la largeur de la voie qu’ils bordent. Les balcons filants, exclusivement prévus aux deuxième et cinquième étages, doivent également se suivre d’un bâtiment à l’autre.
Notez que ces règles strictes ne concerneront pas les hôtels particuliers qui s’inventeront plus créatifs et s’inspireront de différents styles anciens, du gothique au néo-classique. Finalement, les règles d’Haussmann seront assouplies à partir des années 1880 pour satisfaire les architectes. Cette libération créative mènera notamment au développement du mouvement Art Nouveau à la fin du 19e siècle.
L’immeuble haussmannien initial suit alors toujours le même schéma de construction:
Le rez-de-chaussée, dont la façade est strillée, est haut de plafond et accueille des commerces. Il est surmonté d’un entresol, plus bas de plafond, qui fait office de premier étage pour loger les commerçants. Notez que pour les immeubles des plus riches bourgeois, comme dans le quartier de la plaine Monceau, le rez-de-chaussée ne présente pas de commerces pour éviter les inconvénients (passage de clients, livraisons…).
Le deuxième étage est l’étage noble. On y trouve un seul appartement, haut de plafond, avec un balcon filant et de grandes fenêtres aux encadrements richement décorés.
Les troisième et quatrième étages sont réservés à la moyenne bourgeoisie. On y trouve également un seul appartement par palier, et parfois des balcons individuels.
Le cinquième étage présente, lui, deux appartements avec un balcon filant dont le rôle est surtout d’équilibrer la structure de la façade.
Le sixième étage, enfin, quand il existe, accueille les chambres de services.
Par ailleurs, la façade des immeubles haussmanniens, large et ouverte sur la rue, va influencer le plan des appartements qui suivent tous le même modèle divisé en trois parties: réception, intimité et service. Ainsi, après l’entrée ou antichambre, un couloir dessert les pièces de vie toutes situées le long de la façade et en enfilade, à l’image de la distribution des pièces des hôtels particuliers d’Ancien Régime: Grand et petit salons (réception), bureau et chambres (intimité). Les pièces de services comme la cuisine se situent en arrière-plan. La salle à manger n’est pas encore fixée, et elle peut investir les salons de réceptions comme les pièces plus intimes, près de la cuisine.
Enfin, on distingue trois classes d’immeubles haussmanniens dont les plans varient selon le type:
Les immeubles de première classe sont composés de quatre étages, d’un double portail pour laisser passer les calèches jusqu’à un porche abrité, d’écuries dans la cour, et d’un escalier principal en pierre, décoré et doublé d’un escalier de service.
Les immeubles de deuxième classe comportent cinq étages desservis par un escalier principal en bois, doublé d’un escalier de service, et une cour.
Les immeubles de troisième classe n’ont qu’un seul escalier en bois qui dessert de petits appartements. La façade est sobre et ne présente aucun balcon.
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SOURCES
Le financement des travaux d’Haussmann : un exemple pour les pays émergents ? par Bernard Marchand, 2011 Professeur émérite des Universités
« Flamboyant Second Empire ! Et la France entra dans la modernité… » de Xavier Mauduit et Corinne Ergasse aux éditions EKHO.
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