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Photo du rédacteurIgor Robinet-Slansky

EXPOSITION «PARIS 1793-1794, UNE ANNÉE RÉVOLUTIONNAIRE» AU MUSÉE CARNAVALET

Tableau
La République Française, Jean-Baptiste Wicar, 1793

Du 16 octobre 2024 au 16 février 2025, le musée Carnavalet - Histoire de Paris présente une exposition inédite : « Paris 1793-1794, une année révolutionnaire », consacrée à l’An II du calendrier républicain, une période charnière de la Révolution française, et l’une des plus complexes et fascinantes. Pour rappel, le calendrier républicain, qui met fin au calendrier Grégorien chrétien, a été adopté le 6 octobre 1793. Il démarre le 22 septembre 1792, jour de proclamation de la 1ère République par la Convention nationale et 1er jour de ‘l’Ère des Français’.


À travers cette exposition, le musée met en lumière le rôle central de Paris dans la dynamique révolutionnaire, en explorant les événements tumultueux de cet An II qui s’étend du 22 septembre 1793 au 21 septembre 1794 et se retrouve à la croisée des idéaux et des réalités brutales de la Révolution.



Si l'année 1789 brille par la Prise de la Bastille et la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, 1793-1794 se révèle bien plus obscure. À partir de 1793, Paris bascule dans ce qu’on appellera plus tard la Terreur, une période marquée par une violence étatique inédite, mais aussi par l’émergence d’utopies et d’espoirs révolutionnaires. L’exposition illustre parfaitement cette dualité, où des mesures d’exception pèsent lourdement sur la population tout en nourrissant l’imaginaire révolutionnaire en rupture avec celui de la société d'Ancien Régime.



À travers 250 œuvres (objets, affiches, peintures, sculptures, documents…), le parcours propose une exploration complète de cette année charnière tout en contradictions : d’un côté, l'angoisse des Parisiens et Parisiennes, les peurs collectives, les violences politiques, et de l'autre, l'élan pour une société nouvelle et les tentatives de recréer un avenir idéalisé. On découvre ainsi que, malgré la tourmente, la créativité et les célébrations révolutionnaires vont perdurer tout au long de cet An II, rappelant la résilience de la société parisienne de l’époque et la force des idéaux révolutionnaires.



« 1793-1794, UNE ANNÉE RÉVOLUTIONNAIRE » : VISITE

 

Le parcours de visite de l’exposition s’articule en cinq grandes sections.

 

UN NOUVEAU RÉGIME : LA RÉPUBLIQUE

 

La République française émerge dans le chaos de la Révolution, débutant avec l'abolition de la royauté le 21 septembre 1792. Toutefois, la proclamation officielle de la République ne se produit que le 24 octobre 1793. Pendant cette période, Paris devient le centre des transformations politiques et culturelles, avec la Convention nationale comme principale instance législative.

 

Les objets exposés illustrent la sacralité de cette assemblée, incarnée par des figures comme Barère, et Jacques-Louis David qui joue un rôle clé en utilisant l'art pour forger un nouvel esprit républicain. La place du Carrousel se transforme en un lieu symbolique de fraternité, tandis que le télégraphe de Claude Chappe révolutionne les communications.



La fête de l'Unité, célébrée le 10 août 1793, marque l'anniversaire de la chute de la monarchie, tout en soulignant la division politique entre Montagnards et Girondins. Les documents de cette célébration présentés illustrent son caractère officiel et les tensions sous-jacentes de l'époque.


Point histoire : Qui sont les Montagnards et les Girondins ?

Les Montagnards et les Girondins étaient deux factions politiques rivales durant la Révolution française, opposées sur plusieurs points cruciaux. Les Montagnards, proches des sans-culottes parisiens et dirigés par des figures comme Robespierre et Danton, représentaient les couches populaires de Paris et prônaient une République centralisée et radicale, favorable à des mesures extrêmes comme la Terreur pour sauvegarder la Révolution. Les Girondins, plus modérés et majoritairement issus des provinces, étaient favorables à une décentralisation du pouvoir et se méfiaient des mouvements populaires violents. Ces différences idéologiques ont engendré des conflits, culminant en 1793 avec l'élimination des Girondins, accusés de contre-révolution.

 

Quant à leurs noms, les Montagnards sont nommés ainsi parce qu'ils siégeaient sur les bancs les plus élevés de l'Assemblée, tandis que les Girondins étaient simplement nombreux à venir de Gironde.

 

LA RÉVOLUTION AU QUOTIDIEN

 

Le 10 août 1793, jour de fête de l‘Unité et de la Réunion, symbolise à la fois la fin de la monarchie et le début de la Commune insurrectionnelle. Paris se rêve en creuset d'un nouvel ordre, mais fait face à des défis de guerre extérieure, de guerre civile, et de répression.



Le quotidien, marqué par les conflits sociaux et de lourdes pénuries alimentaires, est aussi caractérisé par un système policier rigoureux, où la surveillance et la répression sont omniprésents, réduisant les libertés au nom de l’ordre social. La capitale est divisée en 48 sections contrôlée par la municipalité et la police. L’idée est, par un jeu de surveillance et de dénonciation, de réussir à démasquer les bons et les mauvais citoyens. Pour circuler, il faut désormais se munir de cartes de sûreté, de certificats de résidence ou même de certificat de civisme. Le climat de méfiance et l’angoisse sont à leur paroxysme.



Ces mesures de contrôle d'identité héritées de l'Ancien Régime contribuent à diviser les citoyens. Les femmes, bien que participant activement au mouvement révolutionnaire, voient leur liberté d'action restreinte. La garde nationale émerge comme un symbole de la Révolution, alors que la carmagnole, cette veste coupée en arrondi, qui tire son nom de la célèbre chanson, devient un vêtement politique : populaire, en laine et chanvre, elle se distingue de l’habit et de la culotte des nobles et bourgeois et symbolise une rupture avec l'ancien ordre.



Des changements significatifs touchent également l'éducation avec la loi Bouquier qui, le 19 décembre 1793, établit l'école primaire publique, gratuite et obligatoire, et des initiatives innovantes comme l'école de Mars, qui allie éducation militaire et civique. C'est aussi à cette époque qu'on instaure le système métrique et des mesures actuelles.



Durant cet An II tumultueux, le secteur culturel parisien, notamment le théâtre et la musique, reste dynamique. Des institutions comme l’École de musique municipale façonnent l'univers sonore de la République, tandis que les spectacles de marionnettes jouent un rôle essentiel dans la diffusion des idées révolutionnaires.

 


Enfin, des événements marquants comme l'abolition de l'esclavage le 4 février 1794 et la fête de l'Être suprême le 8 juin 1794 montrent les aspirations d'une nouvelle religion civique et l'impact des luttes sociales et politiques sur la vie parisienne. Pour rappel, la fête de l’Être suprême s’ajoute au culte des martyrs de la Liberté et à celui de la Raison. Il s’agit de remplacer Dieu par une religion universelle et naturelle. Organisée par Jacques-Louis David, la fête célèbre Paris, ville de la Régénération. Robespierre embrase la statut de l’Athéisme aux Tuileries, tandis qu’une montagne est élevée sur le Champ-de-Mars pour célébrer la puissance du peuple révolutionnaire. Cette fête utopique ne durera pas, mais elle marque les aspirations profondes à un changement radical de société.



LA JUSTICE : DE L'ORDINAIRE À L'EXCEPTION

 

La justice révolutionnaire à Paris, incarnée par le Tribunal extraordinaire, est marquée par son caractère d'exception. Contraire au droit commun, elle est chargée de juger les crimes politiques sans appel possible, et marque un tournant significatif par rapport aux idéaux de justice énoncés en 1789.



Georges Jacques Danton souligne la nécessité d'une justice « terrible pour dispenser au peuple de l’être », pour prévenir la vengeance populaire. Le Tribunal révolutionnaire, disposant d'une imprimerie, publie les résultats de ses audiences pour affirmer sa transparence et dissuader les complots.



Les grandes affaires, comme celles de Jean-Paul Marat, Charlotte Corday, Olympe de Gouges, ou bien sûr Marie-Antoinette, passionnent le public tout en suscitant la peur. Les Girondins, considérés comme des opposants à la Révolution, subissent une répression collective, avec un procès retentissant le 30 octobre 1793.

 

Mais en cet automne 1793, c’est surtout le procès de l’ex-reine de France qui retient toute l’attention. Après 28 heures d’audience, Marie-Antoinette est condamnée à la mort sur l’échafaud. Elle est exécutée le 16 octobre 1793, place de la révolution (ancienne place Louis XV, actuelle place de la Concorde). L’ex souveraine incarne alors le martyr de la monarchie déchue.

 


De son côté, Olympe de Gouges, figure emblématique des droits des femmes (en 1791, elle a publié la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne), est arrêtée le 20 juillet 1793 et exécutée le 3 novembre pour ses critiques envers les Montagnards.

 

Par ailleurs, si la capitale devient le centre de cette justice d'exception, des répressions similaires se produisent en province, particulièrement dans les zones en conflit, comme à Toulon.

 

PRISONS ET ÉCHAFAUDS

 

Si la Révolution commence en 1789 par la libération de prisonniers jugés victimes de la société d’ordres, quatre ans plus tard, les prisons sont à nouveau surpeuplées. Des récits sur les conditions de détention et les souffrances des prisonniers émergent, notamment concernant des lieux emblématiques comme les prisons de la Conciergerie, de l'Abbaye, de Saint-Lazare ou encore de Sainte-Pélagie.

 



La guillotine, symbole de la violence révolutionnaire, remplace les anciennes méthodes d'exécution et devient un spectacle public, destiné à dissuader les opposants. Surnommée « le rasoir national » ou « la sainte Guillotine », elle est vue tantôt comme un instrument de progrès, tantôt comme une machine de Terreur. Dans la capitale, les exécutions prononcées par le Tribunal révolutionnaire se multiplient. Savamment orchestrées, elles révèlent l'intensité du climat politique et les enjeux de pouvoir, et marquent la volonté républicaine d’imposer un ordre inflexible.

 

D’un point de vue artistique, des figures comme Hubert Robert, ancien peintre de la Reine, sont fascinées par le bouleversement civilisationnel porté par la Révolution. Ce dernier peindra ainsi les ruines d’églises démolies, ou encore la violation des caveaux royaux de la basilique Saint-Denis. Incarcéré en 1793-1794, il continuera à peindre son temps, immortalisant ce mélange de mélancolie et de défi.



Parmi les autres figures le plus emblématiques de l’époque, le jeune Louis Charles, héritier du trône devenu, pour certains, Louis XVII à la mort de son père, est incarcéré à la tour du Temple avec sa famille dont il est finalement séparé, avant de mourir le 8 juin 1795. À lui-seul, il est le symbole des malheurs de la monarchie.

 

PARIS 1793-1794: PAR-DELÀ LES LÉGENDES

 

Les événements de 1793-1794, au cœur des contradictions de la Révolution française, sont entourés de mythes et de légendes. Les traces de cette période, souvent altérées par des luttes mémorielles, révèlent des tentatives de manipulations des faits et des perceptions. Les rumeurs et les faux récits prolifèrent, nourrissant des peurs et des espoirs contradictoires. Les années révolutionnaires deviennent ainsi le théâtre d'une lutte pour la vérité, où la propagande et la désinformation sont utilisées pour discréditer l'opposition et maintenir le pouvoir.



Cette dernière section souligne comment la mémoire collective de cette période reste complexe et sujette à des relectures contemporaines, offrant une réflexion sur les enjeux de la vérité historique et de la mémoire.

 

INFORMATIONS PRATIQUES

 

  • Quoi ? Exposition : « Paris 1793-1794, une année révolutionnaire »

  • Où ? Musée Carnavalet - Histoire de Paris

    23 rue de Sévigné, Paris 4e

    M° Saint-Paul ou Chemin-Vert

  • Quand ? Du 16 octobre 2024 au 16 février 2025

    Tous les jours de 10h à 18h, sauf les lundis et les 1er mai, 25 décembre et 1er janvier

  • Qui ? Les amoureux de Paris, les passionnés d’Histoire, et les curieux / curieuses !

  • Combien ? Tarif plein : 13 € / Tarif réduit : 11 € (Gratuit pour les -18 ans)

 

SOURCES

 

  • Visite guidée de l’exposition

  • Dossier de presse de l’exposition

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