Suivez-moi dans la jolie ville de Dijon que j’ai découverte cet hiver. Classée ‘secteur sauvegardé’ en 1966, la capitale des ducs de Bourgogne est une cité riche d’Histoire, d’une gastronomie reconnue internationalement (vins, escargots, moutarde, époisses, pain d’épice, nonettes…), de culture (ne pas manquer le superbe Musée des Beaux-Arts, gratuit), et d’édifices aux architectures variées avec, au détour de ses places et ruelles étroites, des maisons médiévales à colombages avec leurs tuiles plates vernissées et colorées, des églises romanes et gothiques, de sublimes hôtels particuliers du 17e & 18e siècles, ou encore le grandiose Palais des Ducs de bourgogne, place de la Libération, et sa Tour Philippe le Bon.
Parmi les trésors architecturaux dijonnais, je vous invite à l’Hôtel Lantin qui abrite aujourd’hui le Musée Magnin.
Quand on se trouve devant cet hôtel particulier, au 4 rue des Bons Enfants, on est surpris de voir une façade au style sobre et classique. Et pour cause! Quand il hérite du terrain en 1652, Etienne Lantin (1610-81), conseiller à la Chambre régionale des comptes, est contraint par l’étroitesse de la parcelle. L’hôtel qu’il fait construire en 1663 diffère donc en apparence des hôtels particuliers de l’époque bâtis entre cour et jardin. Mais lorsqu’on y entre, l’escalier monumental fait tout de suite oublier la sobriété et marque toute la grandeur des lieux, et donc de ses résidents.
Ici, Etienne Lantin choisit un escalier en pierre calcaire dit ‘vuide à la moderne’. Une réalisation innovante pour l‘époque car, s’il est courant dans les hôtels parisiens sous Louis XIII, ce style d’escalier n’arrivera à Dijon que dans les années 1660. Bâti sur une base carrée, il se décompose en trois ensembles de marches soutenues par les murs et 3 poteaux ou ‘noyaux’ qui permettent de créer un vide central (vuide). La cage d’escalier est, à l’étage, ornées de pilastres cannelés, et le dôme octogonal à pans coupés est percé de 4 oeils-de-bœufs. Une frise aux emblèmes de la famille encadre le tout: la guivre (serpent imaginaire) présente sur les armoiries des Lantin ; la chouette, symbole de la déesse de la loi, Thémis, qui fait ici référence aux fonctions d’Etienne Lantin ; l’étoile et le croissant de la mère d’Etienne, Anne Ocquidem ; et les lettres ‘ELCM’ qui mêlent les initiales d’Etienne Lantin et de son épouse Catherine Maleteste.
Plusieurs œuvres sont présentées ici, dont un buste de Diane du 17e, deux angelots porte-torchère en bois doré du 17e, ou encore une toile de Jean Boucher (1568-1633) représentant la ‘Présentation au temple’ de Jésus par ses parents, réalisé en 1620.
Cet escalier ingénieux et majestueux est d’abord un signe de distinction sociale. D’un point de vue pratique, il joue également le rôle de vestibule mais aussi de passage pour les carrosses et chevaux accédant aux écuries au fond de la cour. Il dessert les salons de réception du rez-de-chaussée et les quatre appartements du premier étage.
Différents propriétaires se succèdent au fil des années. En 1829, l’homme politique dijonnais Jean-Hughes Magnin acquiert l’hôtel qu’il transmet à son fils Joseph (1824-1910) et sa femme Pauline qui y élèvent leurs enfants Maurice et Jeanne avant de partir pour Paris où Joseph prend des responsabilités politiques après la chute du Second Empire (1870). D’un point de vue architectural, en 1851, les écuries au fond de la cour de l’hôtel sont rehaussée d’un étage dans un style néo-Louis XV.
Maurice Magnin (1861-1939) est conseiller maître à la cour des Comptes de Paris. Il fréquente l’Hôtel Drouot où il affine ses goûts artistiques. Jeanne (1855-1937), autodidacte, est peintre et amatrice d’art. Tous deux grands collectionneurs, ils décident de créer, dans l’hôtel de leur enfance, un musée dédié aux œuvres (peintures), meubles et autres objets d’art acquis en 50 ans à Paris.
Aisés mais sans grande fortune, les Magnin ont, de fait, été contraints dans le montant de leurs achats, sélectionnant ainsi des œuvres d’artistes moins connus à l’époque, mais tout aussi intéressants et prisés aujourd’hui. Des œuvres repérées par les yeux aguerris de Jeanne et Maurice qui n’hésitaient pas à acheter en dehors des modes. Leur but: rassembler une histoire de l’art sans préjugés. Ils légueront leur hôtel et ses collections à l’Etat en 1937.
La visite du Musée Magnin permet ainsi de traverser les temps forts de la peinture occidentale du16e au 19e, du point de vue très personnel des Magnin, tout en visitant un hôtel particulier aux décors et aménagements allant du 17e au début du 20e.
Prenez le temps d’observer toutes les peintures exposées, souvent sans cartel comme le souhaitaient les Magnin pour laissez chacun libre de les ressentir:
650 peintures françaises : 17e : Le Sueur, La Hyre, Baugin, Vignon; 18e : Patel, La Fosse; 19e : Géricualt, Houël, Girodet, Granet
170 œuvres italiennes de la Renaissance au 18e : Cento, Ridolfi, Crosato, Cariani, Allori, Traversi, Tiepolo…
Des œuvres d’artistes anglais et nordiques du 16e au 20e siècles (Pieter Lastman, Van Bijlert, Weenix…).
Intéressez-vous aussi au mobilier et aux objets d’art qui rescelle de trésors dans les styles classique (Louis XIV), néo-classique (Louis XVI), Premier & Second Empire (notamment dans les appartements du 1er étage), et quelques pièces de style Rocaille (Louis XV).
N’hésitez pas à visiter cet ancien hôtel particulier, mais aussi à visiter Dijon, très accessible en train et sur un week-end.
Informations Pratiques
Toutes les informations pratiques sont à retrouver sur le site de la Ville ou sur le site Destination Dijon, très bien fait.
Je recommande également l’application smartphone ‘Parcours de la Chouette’ ou ‘Chouette’ qui permet, à travers un choix de 3 promenades, de découvrir en une à deux heures les principaux points d’intérêts historiques et culturels de la ville. Elle coûte 2,99€ mais elle les vaut.
Enfin, si vous visitez le Musée Magnin (à faire impérativement), rendez-vous sur leur site Internet pour toutes les informations pratiques et explicatives.
Sources
Les informations recueillies pendant ma visite personnelle
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