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NARBONNE, CAPITALE D’HISTOIRE ET DE PATRIMOINE


Direction Narbonne, dans le département de l’Aude (11), en Occitanie. Une ville coup de cœur, riche d’histoire et de patrimoine.


Fondée en -118 av. JC par les Romains le long de la Via Domitia (première route gallo-romaine), Narbo Martius devient un carrefour commercial entre l’Italie et l’Espagne, et son port est alors le deuxième après Marseille. En l’an 46, Jules César agrandit la colonie romaine de Narbonne qui accueille les vétérans de la Xe légion et renforce sa position de place commerciale (vins, fromages).

Passées aux mains des Wisigoths du 5e au 8e siècles, où elle s’impose en centre religieux chrétien, Narbonne est conquise par les Sarrasins en 719 et devient musulmane. Face aux troupes de Charles Martel (737) puis au siège du nouveau roi franc Pépin le Bref à partir de 752, la ville est reprise aux Arabes en 759 et devient capitale de la Gothie franque.


Narbonne relance son économie et développe une industrie drapière florissante. Redevenue chrétienne, la ville érige de nombreux édifices religieux (Basilique Saint-Paul-Serge, cathédrale Saint-Just-Saint-Pasteur, Palais de l’archevêque…) et le gouvernement de la ville est partagé entre un archevêque (résidant dans le Palais de l’archevêché, toujours visible) et un vicomte (logé au Palais Vicomtal, détruit en 1639). Mais au 14e siècle, la Guerre de Cent ans (1337-1453) contre les Anglais, l’épidémie de peste et la recrudescence de la piraterie vont provoquer le déclin économique de la ville.


Narbonne est alors rattachée à la couronne de France en 1507 par Louis XII (règne 1498-1515) qui en fait une place forte de défense militaire en amont de la frontière franco-espagnole. Un rôle que la ville jouera jusqu’en 1659, quand Louis XIV (règne 1643-1715) et son ministre Mazarin signent avec Philippe IV d’Espagne le Traité des Pyrénées, mettant fin à la guerre de 30 ans entre les deux puissances, et instaurant la paix aux frontières sud-ouest du royaume de France.


Point anecdote : l’arrestation de Cinq Mars à Narbonne.

Au printemps 1642, alors que le conflit franco-espagnol fait rage, l’armée française entreprend de conquérir le Roussillon. Louis XIII (règne 1610-43) et son ministre le cardinal de Richelieu logent à Narbonne pour suivre les événements, le roi au Palais de l’archevêque, Richelieu dans l’ancienne vicomté.


C’est alors qu’en accord avec les Espagnols, un complot est fomenté contre le souverain par le marquis de Cinq Mars, grand écuyer de France et protégé du roi. Mais Louis XIII, prévenu par Richelieu qui réussit à lui fournir les preuves de cette trahison et de la tentative d’assassinat, ordonne l’arrestation de Cinq Mars. Prévenu, ce dernier se cache un temps dans un placard du palais, tente de s’enfuir, avant d’être arrêté et enfermé dans le donjon Gilles Aycelin attenant au palais de l’archevêque, puis transféré à Lyon où il est décapité.


La construction du Canal du Midi de 1666 à 1681, commandée par Louis XIV et confiée à l’architecte Pierre-Paul Riquet, sous la supervision du puissant ministre Jean-Baptiste Colbert, relance l’économie de la région. La création, par la suite, du canal de la Robine (17e-18e siècles) à Narbonne, permet de relier la ville au Canal du Midi et de lui donner accès aux grandes routes commerciales du sud.

Après la Révolution, Narbonne reste une commune rurale viticole et devient la sous-préfecture de l’Aude en 1800. Modernisée sous le Second Empire (1852-70) et en plein essor industriel, la ville obtient son déclassement militaire et peut ainsi s’agrandir et se développer au-delà des fortifications qui sont alors détruites.

Profondément républicaine (la ville s’opposera à Napoléon III à la fin du Second Empire), Narbonne défend la révolte des vignerons du Languedoc en 1907. En effet, des manifestations pacifistes se tiennent dans plusieurs villes, dont Narbonne, pour protester contre les réglementations défavorables aux vignerons qui conduisent à une surproduction de vin et donc à une baisse des revenus. En réaction, le gouvernement de Georges Clémenceau décide l’envoi de troupes militaires pour calmer les esprits. Mais ils s’échauffent, jusqu’aux 19 et 20 juin 1907 où la foule affronte les forces de l’ordre qui tirent, blessent et surtout tuent 7 personnes dont 5 à Narbonne.


Aujourd’hui, Narbonne est un centre touristique attractif, des grandes plages de sable prisées des vacanciers aux nombreux sites patrimoniaux offert par la ville et ses alentours: abbayes, palais et châteaux, églises, sites antiques, villages médiévaux remarquables, étangs et espaces naturels…

Une ville agréable, aux doux accents du sud-ouest méditerranéen, qui ne manque pas de plaire aux visiteurs, passionnés d’histoire ou simplement amateurs d’authenticité.

Plus d’informations sur le site de la ville de Narbonne.

QUELQUES POINTS D’INTÉRÊTS NARBONNAIS


Parmi les sites du patrimoine historique et culturel que j’ai eu l’occasion de découvrir à Narbonne, en voici quelques-uns qui m’ont marqué.


LES HALLES


Contemporaines des halles de Baltard à Paris, bâties sous le Second Empire à l’occasion des grands travaux commandés par Napoléon III au préfet de la Seine, Georges-Eugène Haussmann, les Halles de Narbonne ont été inaugurées en 1900. La structure du bâtiment, en métal et avec ses piliers de pierre, est typique de la fin du 19e et du début du 20e siècle, et lui vaut bien le titre de «plus beau marché de France».

Et le meilleur dans tout ça? Au-delà de leur architecture, les Halles sont aussi un régal pour les gourmets (et les gourmands). Spécialités régionales, légumes frais, poissons, olives et autres vins et fromages locaux, tout a l’air bon! D’ailleurs, il est possible de manger (et boire) sur place, dans l’une des échoppes animées qui ponctuent ce marché couvert populaire.


LE CANAL DE LA ROBINE


Les travaux du canal de la Robine ont été lancés à la fin du 17e siècle à la demande de Louis XIV sur les conseils de son ingénieur et architecte Sébastien Le Prestre, marquis de Vauban (1633-1707). Créé sur un ancien canal creusé au 14e siècle pour alimenter les moulins de Narbonne, le canal de la Robine est finalisé à la fin du 18e siècle. Il peut alors relier la ville au canal du Midi et permettre à Narbonne de bénéficier d’un accès aux routes commerciales du sud de la France, essentielles pour son développement économique.

Aujourd’hui, le rôle commercial de la Robine a laissé place à un lieu de promenade, aux bords duquel les Narbonnais aiment se retrouver pour profiter de la fraîcheur de ses berges, comme de l’effervescence des bars et restaurants qui animent ses rives.


LE PALAIS DE L’ARCHEVÊCHÉ


Edifié en lieu et place de fortifications antiques, le Palais des Archevêques de Narbonne se divise en deux parties:


Le Palais Vieux, bâti aux 13e et 14e siècles, et qui accueille le musée archéologique (actuellement en travaux).


Et le Palais Neuf, construit tout au long du 14e siècle et réaménagé aux 17e, 18e & 19e siècles, où l’on trouve aujourd’hui l’Hôtel de Ville, mais aussi les anciens appartements des évêques de Narbonne et le Musée d’Art avec une belle une collection d’œuvres et d’objets d’arts des 17e et 18e siècles (tableaux, faïences, mobilier), ainsi qu’une riche section dédiée aux peintures orientalistes des 19e et 20e siècles.

Le Palais Neuf, que l’on peut visiter, a été initié par l’archevêque Gilles Aycelin (archevêque de 1290-1311). Ce dernier cherche en effet d’une part à s’éloigner du bruyant chantier de la cathédrale attenant à son Palais (le Palais Vieux), mais aussi à mieux protéger sa résidence. Il décide alors de bâtir un «palais neuf» en commençant par un donjon défensif (la Tour Gilles Aycelin que l’on peut également visiter et qui offre un panorama sur toute la ville) qu’il relie à la tour Saint-Martial du Palais Vieux. Son successeur Bernard de Fargues (archevêque de 1311-1341) ajoute un ensemble de bâtiments accolés au sud et à l’est du donjon. Des travaux poursuivis par l’archevêque Pierre de la Jugie (1347-75) qui agrandit le palais avec le bâtiment des Synodes. L’aile nord est achevée par son successeur et neveu Jean Roger (1375-91) qui en profite également pour réaménager la tour Saint-Martial.


De style gothique, le Palais Neuf sera en partie transformé dans un style classique au 17e et 18e siècles: les façades de la cour sont plaquées pour atténuer leur aspect défensif, et au cœur d’une tour médiévale issue des fortifications de la ville, on crée le Grand Escalier en 1628, à la demande de l’archevêque Louis de Vervins et finalisé par l’archevêque Claude de Rebé (1628-59). Un impressionnant escalier classique de 88 marches qui dessert la salle de réception du palais (salle des Synodes, malheureusement fermée lors de ma visite) au 1er étage, et l’enfilade des appartements de l’archevêque au 2e étage (aujourd’hui le Musée d’Art), dont la grande salle des Audiences, ou encore la chambre du Roi, aménagée en 1632, aux somptueux décors, toujours visibles aujourd’hui.


En 1845, à la demande de l’architecte Viollet-le-Duc, l’aile reliant les Palais Vieux et Neuf est remplacée par un bâtiment de style néogothique qui accueille depuis lors l’Hôtel de Ville de Narbonne.

Les deux Palais sont séparés par le très médiéval passage de l’Ancre qui mène tout droit à la cathédrale Saint-Just-Saint-Pasteur et à son cloître gothique bâti entre 1349 et 1417.

Enfin, sur la place de l’Hôtel de Ville, remarquez le tronçon de voie romaine (Via Domitia) dégagé et exposé aux yeux de tous, témoins du passé romain de la ville.


LE DONJON GILLES AYCELIN


Bâtie entre 1295 et 1306 par l’archevêque de Narbonne Gilles Aycelin (archevêque de 1290 à 1311), cette tour carrée de 42 mètres de haut et aux murs robustes de 4 mètres d’épaisseur, devait à la fois affirmer le pouvoir de l’archevêque, tout en lui garantissant une protection, à quelques pas de son Palais (l’actuel Palais Vieux).


Ce donjon est le premier élément du Palais Neuf qui doit garantir à l’archevêque une résidence sécurisée et somptueuse, digne de ses fonctions.

Il est aujourd’hui possible de gravir les quelques 162 marches (ce que je vous recommande fortement) depuis la salle basse du rez-de-chaussée, voûtée en coupole, jusqu’au sommet. Là, après l’effort, le réconfort! Sur la terrasse, depuis le chemin de guet agrémenté de trois échauguettes octogonales, vous pourrez admirer un panorama exceptionnel sur Narbonne et en particulier sur sa cathédrale toute proche.


LA CATHÉDRALE SAINT-JUST-SAINT-PASTEUR


La cathédrale Saint-Just-Saint-Pasteur de Narbonne se repère à des kilomètres à la ronde, perchée dans les hauteurs de la ville. Mais ce qui fait l’originalité de l’édifice et qui frappe avant tout le visiteur, au-delà de sa silhouette gothique élancée, c’est que ce superbe monument du 13e siècle n’est pas terminé!


En effet, seul le chœur est finalisé, le reste de l’édifice s’imposant autour en ruines inachevées. Si l’archevêque Maurin (1263-1272) inaugure les travaux le 3 avril 1272, c’est son successeur Pierre de Montbrun (1272-86) qui supervise le gros de la construction.


Bâtie dans un style gothique rayonnant inspiré des églises du nord de la France, la cathédrale de Narbonne est la première du genre dans le sud du Royaume, et l’une des plus hautes de France.


Le chœur voûté, qui s’étend sur 55 mètres de long et 48 de large, ainsi que les chapelles -huit chapelles latérales de forme pentagonale et cinq chapelle rayonnantes dans le déambulatoire-, sont édifiés au cours du 13e siècle, à temps pour accueillir une communauté de chanoines en 1332. Les travaux se poursuivent sur le transept et la nef, mais ne seront jamais terminés, tandis que les tours clochers sont érigées au 14e siècle.


Au-delà du chœur, les chapelles sont remarquables, notamment la chapelle Notre-Dame de Bethléem, au centre, avec son retable de pierres polychromes du 14e siècle; ainsi que le maître-autel à baldaquin du 17e, les grandes orgues et les stalles du 18e, ou encore les tombeaux d’archevêques narbonnais. Inclus dans la visite, le trésor de la cathédrale vaut également le détour avec ses pièces d’orfèvrerie, ses livres enluminés et ses tapisseries.

Conseil: pour bien observer la cathédrale, n’hésitez pas à monter sur le Donjon Gilles Aycelin tout proche, et à faire le tour de l’édifice pour admirer les éléments inachevés qui s’y élèvent avec grâce.

Enfin, avant ou après la visite, découvrez le cloître du 14e siècle (1349-1417) qui, au-delà de son intéressante architecture gothique, offre un point de vue sur la cathédrale et sur le Palais de l’archevêché.


L’HORREUM ROMAIN


Au cœur des rues et monuments médiévaux de Narbonne se cache l’un des témoins les mieux conservés de son histoire gallo-romaine: l’horreum.


L’horreum (entrepôt en latin) que nous pouvons visiter, date du 1er siècle avant J.C. On suppose qu’il s’agit de la partie souterraine d’un bâtiment, sûrement un marché ou un entrepôt qui, en surface, accueillait commerçants et artisans. Situé au sud du forum romain et le long du cardo, la voie nord-sud de la ville antique de Narvo Martius, l’horreum est l’un des seuls vestiges de la Narbonne romaine accessible au public.

N'hésitez pas, d’autant plus qu’il y fait frais: un atout non négligeable en été!

LA MAISON DES TROIS-NOURRICES


L’idéal pour visiter Narbonne, c’est de se perdre dans ses ruelles aux accents médiévaux et ponctuées de surprises. Parmi ces surprises, la maison dite des Trois-Nourrices est étonnante. Située rue des Trois-Nourrices, cette habitation Renaissance présente une façade remarquable du 16e siècle richement décorée, et sur laquelle se détachent trois cariatides généreuses aux seins-nus, trois nourrices, donc, qui ont donné son nom au bâtiment.


LA BASILIQUE SAINT PAUL-SERGE


Située dans la rue de l’Hôtel-Dieu, au sud-ouest de la vieille ville de Narbonne, la basilique Saint-Paul-Serge est moins grandiose que la cathédrale Saint-Just-Saint-Pasteur, mais son architecture comme son histoire valent fortement qu’on lui rende visite.


La première église romane, incendiée au 5e siècle, est reconstruite à la fin du 12e siècle (1180) selon un plan et des dimensions déjà similaires à l’actuel bâtiment. Détruit au début du 13e siècle, le chœur est rebâti à partir de 1224 à la demande de l’abbé Robaldus, et l’église bénéficie de nombreuses transformations (nef, transept) jusqu’en 1265.


L’église, désormais de style gothique méridional, aurait été élevée à l’endroit même où Paul, le premier évêque évangélisateur de Narbonne, serait inhumé – son tombeau y aurait en réalité seulement été transféré en 1244.


Les quelques transformations et rénovations des 15e et 16e siècles, comme les restaurations du début du 20e siècle, n’auront pas altéré la solennité que l’on perçoit en pénétrant dans l’église Saint-Paul. Une église érigée en basilique par le Pape Pie XII en 1953 -pour rappel, une basilique est une église consacrée au culte d’un saint.


Enfin, plusieurs légendes entourent la basilique Saint-Paul-Serge.

On dit d’abord que le vieux clocher de l’église serait l’âme de Narbonne. Mais surtout, si vous observez bien l’intérieur du monument pendant votre visite, vous verrez sûrement une grenouille sculptée dans le bénitier. Elle n’est pas là par hasard!


Une première histoire raconte qu’elle aurait été pétrifiée ici parce qu’elle perturbait les offices à force de coassements incessants.


Mais la légende originelle est en réalité liée à celle de l’arrivée de Saint Paul à Narbonne. Originaire de Rome, Paul fût envoyé dans la cité occitane pour évangéliser sa population. Accostant à Bages, petit village non loin de la ville, il est mal accueilli par les habitants qui, pour se jouer de lui, l’obligent à rouler un rocher dans l’étang et à monter dessus pour traverser l’étendue d’eau jusqu’à à Narbonne. Premier miracle: le rocher se met à flotter. Mais les vents se déchaînent et le futur évêque manque de mourir noyé. Arrive le second miracle: une grenouille saute sur le rocher et réussit à le diriger jusqu’à la berge, non loin de Narbonne. La sculpture de l’église rappellerait cette étonnante épopée, le bénitier jouant le rôle du rocher sur lequel est posée la fameuse grenouille navigatrice.


Enfin, dernière anecdote à ce sujet: si vous regarder bien la grenouille, vous verrez qu’il lui manque une patte. On raconte qu’elle aurait été cassée par un jeune compagnon tailleur de pierre. Ce dernier, contraint par son père de retourner à Narbonne pour admirer la grenouille du bénitier de la basilique Saint-Paul qu’il avait manquée lors de sa dernière visite, s’est venger en lui brisant une de ses pattes.


A vous de choisir l’histoire qui vous plaît!



SOURCES

  • Guide du Routard « Roussillon et Aude » 2023/24

  • Visite de la ville de Narbonne et des différents lieux cités.

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